Les femmes du marché, avant-garde de la culture de la manifestation ?

1Traduit de l’allemand par Johanna Probst
Un attroupement de personnes, scandant parfois des slogans, équipées souvent de pancartes ou de banderoles : il suffit de peu de signes pour identifier une manifestation comme telle. Dans la manifestation, la procession s’accompagne d’une protestation physique, elle oscille entre émeute et rassemblement festif, révolution et réforme, menace et commémoration. Grâce à cette combinaison, la manifestation semble s’être aujourd’hui mondialement établie comme forme de protestation. Ainsi avons-nous assisté un peu partout ces derniers temps au retour d’une culture de la manifestation, bien qu’en réaction, le droit de manifester connaisse en de nombreux lieux de nouvelles restrictions. Comment a émergé cette forme de protestation, quelles sont ses conditions de réalisation et ses pré-requis ?

2On ne peut déterminer le « point de départ » de la manifestation politique, car son émergence découle de la combinaison de formes déjà existantes. Son origine hétérogène remonte entre autres à des cortèges religieux, des marches militaires et des rassemblements populaires. Dans la littérature, l’apparition de la manifestation est généralement comprise comme un phénomène du XIXe siècle. Le terme « manifestation », ou encore de « démonstration » au sens d’une proclamation de masse, est utilisé en anglais depuis les années 1830 et en français depuis la deuxième moitié des années 1840 :

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Le mot est ancien, mais l’usage l’avait longtemps cantonné dans le domaine théologique et philosophique, et la langue des Révolutions françaises ne semble pas l’avoir connu. Si, au début des années 1830, on commence à le voir utilisé dans les journaux, à propos d’événements contemporains, et souvent britanniques, c’est encore affublé d’un complément obligé : manifestation de joie, de deuil, d’opinion. Cependant, à la veille de la Révolution de février, il faisait partie du vocabulaire habituel des journalistes, même provinciaux, et des hommes politiques[1].

4En m’intéressant dans cette étude de cas à la marche des femmes parisiennes sur Versailles en octobre 1789, je choisis un point de départ quelque peu antérieur. Je tâcherai de démontrer pourquoi cet événement peut être considéré comme un point paradigmatique dans la protohistoire de la manifestation.

5Peu de temps après le 14 juillet, des femmes du marché démarraient des processions, réitérées ensuite quasi quotidiennement jusqu’à la fin du mois de septembre. Ces marchandes occupaient une place stratégique ; sur le marché ne s’échangeaient pas seulement des marchandises mais aussi des opinions [2]. En particulier, certaines de ces femmes du marché, les « poissardes », étaient connues sous l’Ancien régime pour la rudesse de leur langage : en 1756, un arrêté avait été prononcé pour leur interdire d’insulter leurs concitoyens [3]. Les « processions » de ces femmes du marché avaient le caractère de proclamations de masse, empruntaient toujours un même itinéraire et suivaient un rituel bien déterminé. On passait non seulement aux églises mais aussi à la mairie, où on remettait du pain béni et des fleurs au nouveau maire et au commandant de la Garde nationale de Paris, La Fayette. Tous les cortèges étaient escortés par la Garde nationale nouvellement formée. Le passage par la mairie, l’escorte de la Garde nationale et le fait que les processions étaient à la seule initiative des femmes [4], sont remarquables puisqu’ils indiquent le caractère hautement politique de ces processions.

6L’anecdote suivante, elle aussi, en témoigne : lors d’un heurt intervenu le 18 septembre entre un groupe de femmes du marché et un cortège de femmes vêtues de blanc, issues d’un des districts de Paris, les femmes du marché, marchant vers la mairie, insultèrent les participantes vêtues de blanc de l’autre procession. Elles leur reprochaient de faire des processions pour s’amuser alors qu’il s’agissait pour elles de se procurer du pain.

7À la fin de l’été 1789, la situation d’approvisionnement à Paris continuait à empirer. La famine était de plus en plus considérée comme une manœuvre secrète de la noblesse ; selon le bruit qui courrait, on cherchait à affamer Paris par punition pour la prise de la Bastille. Étant donné que les femmes étaient traditionnellement responsables de l’alimentation de la famille, elles se voyaient tout particulièrement contraintes d’agir. Les longues files d’attente devant les boulangeries favorisaient, malgré la concurrence pour l’achat de pain, la réunion et la solidarité entre les femmes. Les rues formaient en même temps un espace de vie, car une stricte séparation entre domaines privé et public était, en raison des conditions de logement très précaires, impossible pour les classes inférieures dans le Paris du XVIIIe siècle. Le 2 octobre, seul un tiers de la quantité de farine nécessaire pour couvrir les besoins parisiens fut disponible dans les halles à farine [5]. Ainsi, beaucoup de boulangers furent incapables de vendre du pain le lendemain, puisqu’ils n’avaient pas reçu suffisamment de farine la veille. Cet événement fut un déclencheur central pour la mobilisation des femmes. La marche sur Versailles répondit aussi à la démonstration de pouvoir militaire du roi, qui avait appelé le Régiment de Flandres, composé de 14 000 hommes, à Versailles. En outre, le roi s’obstinait à l’époque dans son veto, entre autres contre la Déclaration des droits de l’homme et des citoyens. Ainsi naquit l’idée de ramener le roi à Paris, pour le forcer à sanctionner les résolutions de l’Assemblée nationale nouvellement constituée. Le 3 octobre arriva à Paris le message – ou, selon le point de vue, la rumeur – d’après lequel, lors d’un banquet, les officiers de la garde royale auraient piétiné la cocarde nationale tricolore en la remplaçant par celle du roi, blanche, et celle de la reine, noire. De ce fait, la contre-révolution semblait lancée. Cette nouvelle poussa les femmes à agir ; elles commencèrent à se mobiliser au Palais Royal [6].

8Suite à cela, entre 5 000 et 10 000 femmes (selon les estimations) de différentes couches sociales se réunirent au matin du 5 octobre devant la mairie de Paris. Elles se montrèrent déterminées à engager des actions contre les supposés responsables. Une potence fut érigée de manière ostentatoire sur place, puis des centaines de femmes, suivies d’une poignée d’hommes, pénétrèrent dans la mairie. Elles s’armèrent et marchèrent ensuite de Paris à Versailles. Quelques hommes participèrent, parmi eux certains des « héros » de la Bastille. Le premier cortège arriva dans l’après-midi, après une marche de plusieurs heures sous une pluie intense, à Versailles. À peu près au même moment, 20 000 à 30 000 hommes se mirent en route, après de longues négociations, en direction de Versailles. Il s’agissait d’une sorte de milice citoyenne fondée après la prise de la Bastille afin de protéger ce qui avait été acquis jusque-là et de prévenir l’anarchie dans la ville. Elle avait initialement été instaurée par les districts parisiens et entendait prévenir tout autant une menace militaire de l’extérieur que l’anarchie de l’intérieur [7]. La Garde nationale était également chargée d’assurer le calme le 5 octobre, mais elle sympathisa avec les femmes, c’est pourquoi, tout en le contrôlant, elle légitimait le cortège par sa présence.

9À leur arrivée à Versailles, ces femmes et ces hommes s’adressèrent directement à l’institution nouvellement crée de l’Assemblée nationale. Là, ils se mêlèrent aux députés [8]. Ils exigeaient des mesures pour remédier à la famine, la punition de la garde ainsi que le retrait du Régiment de Flandres. Visiblement, ils participèrent aussi au vote concernant la libre circulation des céréales [9]. En outre, une délégation de femmes fut reçue par le roi. Ce dernier promit de mettre tout en œuvre pour améliorer la situation alimentaire à Paris. Cependant, au dehors, les échauffourées continuèrent. La garde du roi employa les armes ; une femme fut mortellement blessée lors des combats. Par indignation, un garde du corps fut pendu à la grille du château.

10Au crépuscule, les femmes décidèrent de passer la nuit à Versailles. Entre 5 et 6 heures du matin, un groupe de femmes et d’hommes armés, avec parmi eux aussi quelques soldats de la Garde nationale, se rendit au château et tenta d’y pénétrer. La garde s’opposa et il y eut des morts des deux côtés.

11Alors même que le commandant de la Garde nationale s’efforçait d’évacuer le bâtiment, de nombreuses femmes se réunirent sur les marches devant le château et revendiquèrent : « Le roi à Paris ! [10] ». Dans le journal contemporain « Les Révolutions Nationales » on lut à ce propos : « Alors le Roi, M. Necker et M. de La Fayette ont paru sur le balcon. Le Roi a salué le Peuple, qui a répondu à ce salut par vive le Roi et la Nation, venez avec nous, nous vous aimons [11] ». Quand finalement, après de longues hésitations, le roi consentit à venir à Paris, le danger d’une intervention du roi contre la Révolution sembla conjuré.

12Le retour fut décrit par les uns comme un cortège funèbre, par les autres comme une marche triomphale du peuple : « aujourd’hui c’était un Roi conduit en triomphe au milieu de son Peuple, qui pouvait enfin l’approcher, lui parler, et lui prouver que les plus sûres Gardes de Rois sont ceux qui se dévouent volontairement pour la Patrie, hommes, femmes, soldats de la milice parisienne, quelque Cent-Suisses, tout était mêlé [12] ».

13À peu de choses près, les représentations de ce cortège rappellent une procession festive – si seulement il n’y avait pas eu ces têtes empalées des gardes tués : « Ces deux têtes […] font reculer d’horreur. On les promène cependant en triomphe dans Versailles, et tout Paris les a vu aujourd’hui arriver sur les midi et demi [13] ». Ici apparaît l’oscillation de la manifestation entre le pouvoir de la « masse impuissante » et la démonstration martiale de pouvoir, la présence simultanée de la dimension symbolique et de la confrontation physique. Voici deux éléments typiques de la manifestation qui semblent justement expliquer sa diffusion. C’est ce moment démonstratif qui retient mon intérêt particulier. On l’observe sur une gravure de l’époque.

Avant-garde des femmes allant à Versailles, Collection Hennin, 21,5 x 32 cm, Bibliothèque nationale (Paris)

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Avant-garde des femmes allant à Versailles, Collection Hennin, 21,5 x 32 cm, Bibliothèque nationale (Paris)

14Cette gravure anonyme datant, selon les indications de la Bibliothèque nationale, de l’époque, a selon Kerstin Michalik probablement été réalisée juste après les événements [14]. Elle porte ici le titre « Avant-garde des femmes allant à Versailles, 5 octobre 1789 ».

15Elle existe en différentes couleurs et avec différentes inscriptions [15]. Je ne saurais livrer des informations plus détaillées sur la réception et la circulation de cette œuvre. Viktoria Schmidt-Linsenhoff note à propos de telles illustrations imprimées que des gravures atteignaient des tirages de 20 000 exemplaires et ne coûtaient que cinq à huit sous, ce qui représentait apparemment un peu plus que la ration journalière de pain d’une travailleuse. « Les impressions d’images représentant des événements, des portraits et des allégories politiques décoraient des habitations privées et des espaces publics des sociétés de sections, des clubs politiques, des cafés et des maisons jardinières. Ceux qui ne pouvaient ou ne voulaient les acheter les voyaient malgré tout sur les présentoirs des magasins dans les grandes villes et chez les marchands et marchandes de tableaux ambulants à la campagne [16] ». Depuis le 31 juin 1789, les illustrations imprimées n’étaient plus soumises à la censure. Elles informaient la population – dont, selon Schmidt-Linsenhoff, deux tiers des femmes et la moitié des hommes étaient analphabètes – des plus importants événements et véhiculaient des représentations évocatrices de notions politiques abstraites [17].

16Cette image montre des femmes portant différentes armes, la majorité d’entres elles modestement vêtues, avec des guimpes et des sabots, certaines portant une cocarde. À gauche au premier plan, nous apercevons une femme bourgeoise avec un chapeau élégant, qu’une autre femme retient par le bras. Suivant des récits, des nobles surnommées « femmes à chapeau » ont été forcées de se joindre à la marche sur Versailles [18]. À la tête du groupe se trouve une femme portant un tambourin, devancée par une autre femme sur son cheval. Ces deux femmes sont fréquemment mentionnées dans des récits écrits. Ici, c’est avant tout cette pancarte représentant une balance et coiffée d’un bonnet phrygien qui retient notre intérêt. Dans l’antiquité romaine, ledit bonnet était porté par ceux qui avaient été libérés de l’esclavage. Le panneau est donc un indicateur du caractère prémédité de l’action : une « avant-garde » semble avoir préalablement réfléchi à des moyens de véhiculer efficacement les revendications. La balance fait allusion à l’égalité divine et sociale rappelant en même temps le travail des femmes du marché – le pesage de la marchandise. Les piques et les pioches ne dépassent pas le mur, contrairement au panneau coiffé du bonnet phrygien qui s’en trouve davantage mis en exergue.

17Dans les dossiers juridiques établis suite aux enquêtes sur les incidents des 5 et 6 octobre, des témoins oculaires soutiennent que certains des hommes et femmes que l’on laissa accéder à l’Assemblée nationale auraient porté des pancartes. Le témoin numéro 220 par exemple dépose qu’une femme « tenait dans ses mains un bâton surmonté d’un tableau ». La présence de ce tableau lui aurait semblé indécente et il aurait exigé qu’il lui soit ôté [19].

18L’historien social E. P. Thompson étudiant des soulèvements liés à la pénurie de pain dans la modernité précoce, qualifie cela de contre-théâtre : alors que les dominants appuient leur hégémonie par un certain style théâtral, les couches inférieures auraient également recours à une mise en scène de la menace [20].

19Thompson constate que les soulèvements de famine ne peuvent être compris comme des excès de violence soudains de la part de la « populace », mais que ces comportements de protestation fonctionnaient par transmission symbolique et se déroulaient souvent de manière très disciplinée. Ces masses pratiquant la protestation ne cherchaient pas, selon Thompson, à simplement briser un ordre, elles ne procédaient donc pas par pillages, mais la foule se réclamait de certaines valeurs éprouvées. Ainsi, se défendait-on par exemple contre le prix du marché et insistait-on sur un prix juste ; leur cadre de référence était une « économie morale ». Par conséquent, Thompson soulignait que les soulèvements de famine ne devaient pas simplement être interprétés comme une suite directe de la pénurie alimentaire, mais plutôt comme le signe d’une remise en cause profonde du système économique dominant. Ce serait donc la perception de l’injustice et pas seulement une pénurie matérielle qui expliquerait l’émergence de protestations de masse pendant la Révolution française [21]. La référence à Thompson permet d’accentuer la finalité autre que simplement alimentaire des protestations : les participants à l’action étaient poussés non seulement par des soucis économiques, mais également par la crainte politique d’une contrerévolution comminatoire [22]. En effet, quasiment aucune valeur monétaire n’a disparu de l’Hôtel de Ville, d’où le soulèvement des femmes a pris son départ ; les petites sommes disparues ont apparemment été remboursées quelques semaines plus tard [23].

20Lors que les marchandes se rendaient à Versailles, elles renouaient avec ces comportements ritualisés des soulèvements de famine décrits par Thompson, mais aussi avec des pratiques traditionnelles des réceptions royales. Ce précédent créait un cadre symbolique pour la marche sur Versailles : la protestation des Parisiennes commençait comme une procession mais n’en restait pas là. La pancarte et les têtes coupées présentées de manière ostentatoire sont les signes de deux modes de démonstration de pouvoir, encore qu’ils soient accentués quelque peu différemment. Or, la limite entre ceux-ci est floue dans la mesure où ils se rejoignent ici dans un même événement, la marche sur Versailles. Dans l’acceptation militaire du terme, « avant-garde » renvoie à ceux qui entrent en contact direct avec l’ennemi ; dans le domaine artistique il désigne des groupes de personnes établissant de nouvelles formes de perception.

21Ainsi, le tableau « Avant-garde des femmes allant à Versailles » ne montre pas seulement une avant-garde au sens militaire, mais aussi, dans une perspective moderne, une avant-garde de la culture de la manifestation, d’autant plus que la notion de manifestation n’était pas employée à l’époque dans ce sens, bien que certains historiens y aient recours avec beaucoup d’évidence dans ce contexte [24]. Ici s’avère également la plus-value potentielle des sources visuelles : attribuer une fonction heuristique à des images historiques ne veut pas dire trouver sur ces images la confirmation d’informations déjà connues par d’autres sources, mais plutôt percevoir de nouveaux aspects à propos des, et grâce aux images. Dans ce cas concret, j’ai d’abord découvert la pancarte dans des sources visuelles pour ensuite la rechercher dans les témoignages écrits – ce qui met en évidence la fonction heuristique dont les images peuvent être porteuses.

22Quelles étaient les conséquences de la marche sur Versailles ? L’Assemblée nationale et les communes entamèrent des démarches afin d’améliorer l’approvisionnement de Paris en nourriture. L’Assemblée ordonna une suspension des exportations de céréales et promit de fixer le prix du blé à un prix raisonnable [25]. De plus, le cortège apporta des céréales et de la farine à Paris. De fait, la situation d’alimentation s’améliora par la suite, bien que la crise du pain se soit poursuivie pendant encore un mois [26]. Le roi, quant à lui, approuva finalement la Déclaration des droits de l’homme ainsi que la suppression des droits féodaux [27].

23En quoi la marche sur Versailles se distingue-t-elle de processions antérieures ? Lors d’une procession, se crée un rapport réciproque particulier entre l’espace territorial et le corps collectif : « Le groupe construit une relation à l’environnement spatial et organise l’espace en même temps qu’il s’organise par l’arrangement de la procession [28] ». L’efficacité symbolique réside ici dans le fait que la signification de lieux et de (frontières de) groupes est simultanément négociée et mise en rapport : « Lors de processions, les frontières sont confirmées, revendiquées ou transgressées par la mise en œuvre dans l’espace [29] ».

24On observe des processions dans différentes cultures, sous diverses circonstances et à différentes époques. Déjà dans l’Antiquité, les processions présentaient un caractère politique. Dans la communauté en voie de formation de la polis, des processions à destination du sanctuaire extra-urbain de Héra faisaient apparaître le « peuple », le dèmos. La construction de routes sacrées constituait le pré-requis logistique pour cet événement public : on empruntait ensemble ce chemin dans le cadre d’une communauté de prière et de sacrifice et selon un « ordre de marche » bien défini qui reflétait le prestige social et l’autorité politique des divers participants de la procession.

25En France aussi, certaines processions revêtent déjà un caractère politique avant la Révolution française. En 1769 par exemple, l’Almanach Spirituel dresse une liste de 196 processions à travers le centre de Paris [30] : « Les jours de processions, la compétition entre les deux paroisses menait de temps à autre à de violents conflits, lors desquels les fractions coléreuses se maltraitaient mutuellement avec des lanternes, des bannières et des crucifix, tel qu’il était le cas en juillet 1773 [31] ».

26Même auparavant, en 1589, au temps des guerres de Religion et de la Ligue, il y avait en France des processions à caractère explicitement politique. Celles-ci avaient initialement été impulsées par la noblesse et le clergé. Ces derniers ont cependant perdu la maîtrise des événements qui se retournaient alors contre le roi et le clergé. « À partir du 24 février 1589, jour de la fête de l’exaltation de la Croix, s’ouvrit un cycle ininterrompu de processions qui demeurèrent à travers l’histoire comme la caractéristique principale de la Ligue [32]. » Ici s’observe le mélange déjà évoqué entre protestation, politique et procession. L’absence de parlement constitue cependant une différence avec le moment historique ultérieur (octobre 1789). À cela, s’ajoutent manifestement des différences au niveau symbolique. Quand des bannières ou des blasons accompagnent une procession, elles servent entre autres à la présentation de soi et à la démonstration de pouvoir de la part d’un groupe. Elles sont donc toujours synonymes d’un rapport politique. Or, elles ne semblent pas systématiquement exprimer la critique et les revendications politiques comme nous avons pu le montrer pour la pancarte portée lors de la marche sur Versailles – bien que la limite entre manifestation et procession soit floue.

27La manifestation est capable de rendre visibles les limites de la « démocratie », le caractère non-démocratique de régimes au pouvoir. Pour pouvoir être efficace, elle dépend en même temps de certaines « structures démocratiques [33] ». Ainsi, au moment de la marche sur Versailles, quelques mois après la prise de la Bastille, l’Assemblée nationale nouvellement établie constitue un parlement actif. Pour les femmes qui n’étaient pas reconnues en tant que sujets politiques et qui n’obtenaient pas de droit de regard politique, la Révolution française représentait une évolution ambivalente [34].

28L’évaluation du rôle de la femme dans la Révolution et, par là-même, la perception de la marche sur Versailles, ont donc changé au cours de ces années. Des voix critiques décrivaient ladite marche comme une démonstration du pouvoir belliciste de la populace et ses participants comme une bande d’assassins [35]. Une femme surnommée Reine-Louise Audu fut par exemple arrêtée et ne fut libérée de prison qu’en septembre 1791 dans le cadre d’une amnistie générale.

29En revanche, après l’échec de la tentative de fuite du roi et le massacre sur le Champ de Mars en réaction à une manifestation de masses ayant réclamé la destitution du roi, l’engagement révolutionnaire des femmes apparut en 1791 sous un autre jour. Désormais, Audu fut célébrée comme une héroïne [36]. Lors de la Fête nationale en 1793, les femmes ayant participé à la marche des 5 et 6 octobre et étant rentrées à Paris avec le roi, furent déclarées « héroïnes de la Révolution [37] ». Dans les années 1789-1790 cependant, le gouvernement s’ingénia à ne récompenser publiquement que les femmes qui, lors de la marche sur Versailles, s’étaient démarquées par leur engagement en faveur de l’ordre. Certains types de comportement étaient valorisés par l’attribution de médailles ; seules les Parisiennes ayant œuvré pour le calme recevaient des honneurs. Elles furent donc récompensées pour leur action contre leurs concitoyennes plus radicales [38].

30On ne peut s’étonner que les femmes du marché aient été dominantes lors de la marche sur Versailles. Certains jours, elles se rendaient traditionnellement à Versailles pour des réceptions ; il leur incombait de confirmer la naissance de l’héritier du trône. Ainsi, de fait, produisaient-elles de la « publicité [39] » et, ce faisant, ne mâchaient manifestement pas leurs mots : « les échanges verbaux entre le roi et les femmes du marché pouvaient cependant, lors de mauvaises années comme 1750, devenir assez tendus : pris de panique par les disparitions mystérieuses d’enfants de rue, les femmes du marché à Paris menaçaient d’aller à Versailles et d’arracher les cheveux au roi s’il ne les protégeait pas de la police. Ces femmes du marché acquéraient ainsi une certaine légitimité publique et le privilège de l’expression politique libre dont aucun autre groupe dans la société française sous l’Ancien régime ne jouissait [40] ». Les « dames des halles » n’étaient donc pas simplement des « impuissantes », car au sein de la population travailleuse, elles possédaient des privilèges. Par conséquent, la participation de ces femmes fut également discutée à l’étranger, comme en témoigne un rapport allemand paru en novembre 1789 : « Depuis l’appel au rassemblement des États généraux […], les poissardes se sont entièrement consacrées au domaine politique et ont multiplié avec beaucoup de zèle leurs connaissances en la matière, avant même de réussir à se propulser à la tête du Tiers-Etat. Déjà en début de cette année, on les trouvait devant les cafés du Palais Royal, où elles écoutaient très attentivement les hommes politiques et les applaudissaient ou leur montraient les poings, selon qu’ils avaient, à leur avis, mal ou bien parlé [41] ».

31Dans la mesure où le suffrage censitaire était applicable à l’époque, ces mêmes femmes – ainsi que les quelques hommes ayant participé – n’avaient néanmoins aucune possibilité de faire valoir régulièrement leurs souhaits à l’Assemblée nationale. Les femmes n’avaient droit qu’à des expressions d’opinion extra-parlementaires et perdaient ainsi de l’influence politique [42] – une circonstance qui, d’autre part, s’observe également dans d’autres contextes révolutionnaires.

32Par suite, les événements des 5 et 6 octobre peuvent aussi être interprétés comme une tentative d’ouvrir l’« espace politique figé », la « pétrification du politique [43] » : « Ceux qui jusque-là ne comptaient pas doivent se frayer un accès au lieu de décision [44] ». Harriet Applewhite et Darline Gay Levy pensent que les femmes du Paris révolutionnaire ont alors inventé avec leurs pieds la signification et la fonction d’un nouveau principe de légitimité. Bien que ce « principe pratique de légitimité » ne s’imposât pas à l’époque, la marche des femmes, qui ne reculait ni devant le Palais Royal, ni devant l’Assemblée nationale, rendait visibles les limites contingentes du dèmos, du peuple politiquement constitué. Elle faisait apparaître une exclusion, et en même temps le fait que les exclus ne sont pas impuissants [45]. La technique culturelle de la manifestation ainsi développée ajoute une pointe de critique du pouvoir à la dimension démonstrative de la procession ; cette protestation avait ainsi recours à une forme ayant fait ses preuves.

33Danielle Tartakowsky voit la manifestation et la révolte comme des contraires. Elle décrit la manifestation comme la « mort de la révolte », puisque la manifestation évolue dans un espace symboliquement et juridiquement établi. D’une certaine façon, elle fait donc déjà partie du système politique. Celles et ceux qui manifestent doivent disposer d’un certain statut et être acceptés comme participant à un espace symbolique divisé, pour que leur pure présence puisse porter ses fruits. Or, dans certaines circonstances, les manifestations mènent et ont en effet mené, au passé et au présent, à des révolutions. Tartakowsky constate donc très justement : « [cela] ne l’empêche pas de conserver avec la révolte des liens de diverse nature qui en accentuent la portée et parfois lui restituent certains de ses traits [46] ». Lors du soulèvement survenu sur l’île aujourd’hui nommée Haïti quelques années après la marche sur Versailles, la manifestation n’apparaît pas, en revanche, comme une forme envisageable de protestation [47]. Pour le dire de manière « idéal-typique », et donc de manière en quelque sorte anhistorique : les « esclaves » ne manifestent pas, ils se révoltent.

34Or, les marchandes et tout particulièrement celles des halles du marché – les femmes participantes ne constituaient d’autre part nullement un groupe homogène [48] – n’étaient pas de simples impuissantes – et ce grâce à leur fonction traditionnelle génératrice de publicité. L’exclusion des femmes comme conséquence de la révolution peut donc aussi être comprise comme réaction au changement structurel qui se profilait [49]. L’apparition de la manifestation comme forme de protestation serait ainsi intimement liée au parlementarisme [50]. La marche des femmes du marché est en même temps l’expression de leur longue tradition de participation politique en tant que membres d’une corporation [51], tout comme de la perte de pouvoir expérimentée par elles. La dialectique entre privation de droits et droits transmis et le questionnement ainsi soulevé à propos des frontières du dèmos, font de cet événement un point paradigmatique de l’histoire de la manifestation.

Notes

  • [1]
    Robert, « Aux Origines de la Manifestation en France (1789-1848) », in Favre, La Manifestation, Paris, 1990, p. 69-90, p. 70.
  • [2]
    Majer, Frauen, Revolution, Recht. Die grossen europäischen Revolutionen in Frankreich, Deutschland und Osterreich 1789 bis 1918 und die Rechtsstellung der Frauen. Unter Einbezug von England, Russland, der USA und der Schweiz, Zürich, 2008, p. 28.
  • [3]
    Michalik, Der Marsch der Pariser Frauen nach Versailles am 5. und 6. Oktober 1789. Eine Studie zu weiblichen Partizipationsformen in der Frühphase der Französischen Revolution, Pfaffenweiler, 1990, p. 19. Dans la suite du texte, je ferais à plusieurs reprises référence à cet écrit.
  • [4]
    Ibid., p. 28.
  • [5]
    Ibid., p. 42.
  • [6]
    Un événement qui aura lieu quelques années plus tard apparaît intéressant dans ce contexte : en 1793, on envisagea d’obliger non seulement les hommes mais aussi les femmes à porter la cocarde bleu-blanc-rouge. « Ceci suscita l’opposition des femmes du marché de Paris, qui souhaitèrent travailler sans être importunées par de telles impositions politiques et qui ne voulaient pas perdre leur clientèle royaliste ». Majer, Frauen, Revolution, Recht. Die grossen europäischen Revolutionen in Frankreich, Deutschland und Osterreich 1789 bis 1918 und die Rechtsstellung der Frauen. Unter Einbezug von England, Russland, der USA und der Schweiz, p. 41, traduction par l’auteure.
  • [7]
    Schulin, Die französische Revolution, München, 1988, p. 65.
  • [8]
    Godineau, Citoyennes Tricoteuses. Les femmes du peuple à Paris pendant la Révolution française, Aix-en-Provence, 1988, p. 110.
  • [9]
    Rudé, Die Massen in der französischen Revolution, München, 1961, p. 104.
  • [10]
    Michalik, Der Marsch der Pariser Frauen nach Versailles am 5. und 6. Oktober 1789. Eine Studie zu weiblichen Partizipationsformen in der Frühphase der Französischen Revolution, p. 76.
  • [11]
    Les Révolutions Nationales (3.-7. Oktober), 1789, p. 371.
  • [12]
    Ibid., p. 372.
  • [13]
    Ibid., p. 369.
  • [14]
    Michalik, Der Marsch der Pariser Frauen nach Versailles am 5. und 6. Oktober 1789. Eine Studie zu weiblichen Partizipationsformen in der Frühphase der Französischen Revolution, p. 84.
  • [15]
    Gojon, Iconographie critique des journées révolutionnaires des 5 et 6 octobre 1789, 1973.
  • [16]
    Schmidt-Linsenhoff, « Frauenbilder der Französischen Revolution », in Schmidt-Linsenhoff, Sklavin oder Bürgerin ? Französische Revolution und neue Weiblichkeit 1760-1830, Marburg, 1989, p. 422-429, p. 422, traduction par l’auteure.
  • [17]
    Ibid.,
  • [18]
    Michalik, Der Marsch der Pariser Frauen nach Versailles am 5. und 6. Oktober 1789. Eine Studie zu weiblichen Partizipationsformen in der Frühphase der Französischen Revolution, p. 49. Rudé, Die Massen in der französischen Revolution, p. 102.
  • [19]
    « …qu’une des femmes, debout à la barre, tenoit dans ces mains un bâton surmonté d’un tableau dans lequel le déposant n’a pu rien distinguer ; que cependant le déposant avertit M. l’Evêque de Langres, qui présidoit en ce moment, à cause de la sortie de M. Mounier, qui étoit allé chez le roi, qu’il seroit à propos de faire retirer ce tableau dont la présentation étoit indécente ». Procédure Criminelle, instruite au Châtelet de Paris, sur la dénonciation des faits arrivés à Versailles dans la journée du 6 octobre 1789. Imprimé par ordre de l’Assemblée nationale, Paris 1790, p. 74 (2. Teil). Un autre témoin rapportait qu’un homme vêtu de noir aurait porté une espèce d’écusson ovale et se serait présenté comme le porte-parole des femmes (« ayant à leur tête un homme vêtu de noir, portant au bout d’un bâton une espèce d’écusson ovale ; que ce particulier dit : Je suis l’orateur des citoyennes »). Procédure Criminelle, instruite au Châtelet de Paris, sur la dénonciation des faits arrivés à Versailles dans la journée du 6 octobre 1789. Imprimé par ordre de l’Assemblée nationale, p. 181.Le but initial de la commission d’enquête instaurée en 1790 était de présenter la marche des femmes comme le résultat d’intrigues des forces conspiratrices du duc d’Orléans et du comte Mirabeau, d’où l’intérêt de décrire la marche sur Versailles comme un événement orchestré d’en haut. Voir à ce propos : Blakemore/Hembree, « Edmund Burke, Marie Antoinette, and the Procédure Criminelle », in The Historian 63.3 (2001), p. 505-520.
  • [20]
    Thompson, « “Die moralische Okonomie” der englischen Unterschichten im 18. Jahrhundert », in Groh, Plebeische Kultur und moralische Okonomie. Aufsätze zur englischen Sozialgeschichte des 18. und 19. Jahrhunderts, Frankfurt am Main, 1980a, p. 67-130 ; Thompson, « Patrizische Gesellschaft, plebeische Kultur », in Groh, Plebeische Kultur und moralische Okonomie. Aufsätze zur englischen Sozialgeschichte des 18. und 19. Jahrhunderts, Frankfurt am Main, 1980b, p. 169-202 ; Thompson/Puls, Wahrnehmungsformen und Protestverhalten. Studien zur Lage der Unterschichten im 18. und 19. Jahrhundert, Frankfurt am Main, 1979.
  • [21]
    Voir aussi : Patel, « Food riots », in Ness, The International Encyclopedia of Revolution and Protest.1500 to the Present, Malden, 2009, p. 1207-1210.
  • [22]
    Michalik, Der Marsch der Pariser Frauen nach Versailles am 5. und 6. Oktober 1789. Eine Studie zu weiblichen Partizipationsformen in der Frühphase der Französischen Revolution, p. 21.
  • [23]
    Rudé, Die Massen in der französischen Revolution, p. 103.
  • [24]
    Voir par exemple : Ibidem ; Rudé, The March to Versailles, The Crowd in the French Revolution, Oxford, 1959, p. 61-79
  • [25]
    « Ein Augenzeugenbericht über den Zug der Marktweiber nach Versailles », in Paschold, Die Französische Revolution. Ein Lesebuch mit zeitgenössischen Berichten und Dokumenten, Stuttgart, 1989, p. 111-117, p. 116.
  • [26]
    Rudé, Die Massen in der französischen Revolution, p. 106-107.
  • [27]
    Grubitzsch/Bockholt, Théroigne de Méricourt, die Amazone der Freiheit, Pfaffenweiler 1991, p. 82.
  • [28]
    Goldhill/Osborne, Performance Culture and Athenian Democracy, Cambridge, 1999, p. 297, traduction par l’auteure.
  • [29]
    Gengnagel/Horstmann/Schwedler, « Einleitung », in Gengnagel/Horstmann/Schwedler, Prozessionen, Wallfahrten, Aufmärsche. Bewegung zwischen Religion und Politik in Europa und Asien seit dem Mittelalter, Köln, 2008, p. 3-15, p. 5, traduction par l’auteure.
  • [30]
    Schwarte, Philosophie der Architektur, Paderborn, 2009, p. 272.
  • [31]
    Ibidem, p. 271, traduction par l’auteure.
  • [32]
    Constant, La Ligue, Paris, 1996, p. 219.
  • [33]
    De la même manière, les manifestations en Afrique du Nord et dans le monde arabe étaient plus efficaces dans des « démocraties de façade » que dans des systèmes monarchiques. Voir à ce propos mon futur projet « How Street Protests Spread and Demonstrations Disperse ».
  • [34]
    Olympe de Gouges, qui avait rédigé une déclaration des droits des femmes, mourut sur l’échafaud.
  • [35]
    Les expressions d’Edmund Burke sont restées particulièrement célèbres dans ce contexte. Burke/Mitchell, Reflections on the Revolution in France, Oxford, 1999, p. 70. Voir aussi : « De Rivarol, Rivarol über den Zug der Marktweiber nach Versailles (5./6. Oktober 1789) », in Paschold, Die Französische Revolution. Ein Lesebuch mit zeitgenössischen Berichten und Dokumenten, Stuttgart, 1989, p. 101-112, p. 102.
  • [36]
    Michalik, Der Marsch der Pariser Frauen nach Versailles am 5. und 6. Oktober 1789. Eine Studie zu weiblichen Partizipationsformen in der Frühphase der Französischen Revolution, p. 114.
  • [37]
    Majer, Frauen, Revolution, Recht. Die grossen europäischen Revolutionen in Frankreich, Deutschland und Osterreich 1789 bis 1918 und die Rechtsstellung der Frauen. Unter Einbezug von England, Russland, der USA und der Schweiz, p. 34.
  • [38]
    Michalik, Der Marsch der Pariser Frauen nach Versailles am 5. und 6. Oktober 1789. Eine Studie zu weiblichen Partizipationsformen in der Frühphase der Französischen Revolution, p. 1053
  • [39]
    Applewhite, « Reaktionen auf den politischen Aktivismus der Frauen des Volkes im revolutionären Paris von 1789 bis 1793 », in Held, Frauen im Frankreich des 18. Jahrhunderts : Amazonen, Mütter, Revolutionärinnen, Hamburg, 1989, p. 35-50, p. 71.
  • [40]
    Hesse, The « other » Enlightenment. How French Women Became Modern, Princeton, 2001, p. 17, traduction par l’auteure.
  • [41]
    Schulz/Kraus, Beschreibung und Abbildung der Poissarden in Paris, 1789, p. 4, traduction par l’auteure. Les deux auteurs considèrent l’agir de ces femmes, étant à leurs yeux folles, d’un point de vue critique : « L’être furieux de ces bougresses lors des cruelles présentations qui venaient coup sur coup ces jours de la prise de la Bastille, était indescriptible. La vue du sang semblait les rendre folles comme certaines bêtes sauvages, elles se saisirent des troncs des exécutés pour les traîner sous des hurlements atroces dans les rues, pendant que leurs amis promenaient les têtes embrochées sur des piques dans les rues ». Schulz/Kraus, Beschreibung und Abbildung der Poissarden in Paris, p. 10, traduction par l’auteure.
  • [42]
    Opitz, « Von der “querelle des femmes” in den Salons zur Frauen-Volksbewegung. Überlegungen zur Politisierung von Frauen während der französischen Revolution », in Riepl-Schmidt, Frauen und Revolution. Strategien weiblicher Emanzipation 1789 bis 1848, Tübingen, 1998, p. 14-32, p. 24.
  • [43]
    Dieser Begriff prägte Ludger Schwarte, Philosophie der Architektur, p. 268.
  • [44]
    Applewhite, Reaktionen auf den politischen Aktivismus der Frauen des Volkes im revolutionären Paris von 1789 bis 1793, p. 89.
  • [45]
    Rancière, La Mésentente. Politique et philosophie, Paris, 1995.
  • [46]
    Tartakowsky, « La manifestation comme mort de la révolte », in Révolte et Société II (1988),239-247, p. 242.
  • [47]
    Le rôle de la France révolutionnaire par rapport à l’esclavage est complexe et variable. Honour, The Image of the Black in Western Art. From the American Revolution to World War I, Cambridge (Mass.), 1989, p. 78 ; James, The Black Jacobins. Toussaint Louverture and the San Domingo Revolution, London, 2001 (1938) ; Gilroy, The black Atlantic. Modernity and Double Consciousness, London, 1993 ; Trouillot, Silencing the Past. Power and the Production of History, Boston, 1995 ; Fässler, Reise in Schwarz-Weiss. Schweizer Ortstermine in Sachen Sklaverei, Zürich, 200 ; Buck-Morss, Hegel, Haïti, and Universal History, Pittsburgh, 2009 ; Linebaugh/Rediker, Die vielköpfige Hydra. Die verborgene Geschichte des revolutionären Atlantiks, Berlin, 2008.
  • [48]
    « Ainsi, les “dames des halles” étaient intéressées par la libéralisation du commerce, alors que “révolutionnaires républicaines” étaient favorable au plafonnement des prix. » Opitz, Von der “querelle des femmes” in den Salons zur Frauen-Volksbewegung. Überlegungenzur Politisierung von Frauen während der französischen Revolution, p. 28.
  • [49]
    Opitz, « Auf der Suche nach den vergessenen Töchtern der Revolution », in Fieseler/Schulze, Frauengeschichte gesucht – gefunden ? Auskünfte zum Stand der historischen Frauenforschung, Köln, 1991, p. 146-163, p. 157.
  • [50]
    Tilly aussi souligne ce rapport, mais le date principalement du XIXe siècle. « Certaines autres formes proactives d’action collective mûrissaient au XIXe siècle. La manifestation, le rassemblement public et le lancement de pétitions commençaient à prospérer avec l’émergence de la politique et les élections de masse. » Tilly, « Hauptformen kollektiver Aktionen in Westeuropa 1500-1975 », in Geschichte und Gesellschaft 3.2 (1977), 153-163, p. 157, traduction par l’auteure.
  • [51]
    Opitz, Auf der Suche nach den vergessenen Töchtern der Revolution, p. 149.