Marx en Italie au début du XXIe siècle

1L’originalité interprétative de la tradition italienne au siècle dernier a été profondément liée à l’histoire politique et sociale du pays : l’historicisme d’inspiration gramscienne, l’École de Della Volpe et l’opéraïsme, les lignes interprétatives sans aucun doute les plus influentes appartiennent à une époque où les moments théorique et politique étaient entrelacés de manière inextricable. La défaite du mouvement ouvrier d’abord, les métamorphoses subies par l’ancien PCI (Partito Comunista Italiano), et finalement le changement des équilibres géopolitiques qui ont suivi la chute du mur de Berlin, ont ouvert une nouvelle phase dans laquelle les lectures de Marx ont acquis un caractère de plus en plus académique. D’ailleurs, l’extraordinaire travail philologique mené par les éditeurs des Marx Engels Gesamtausgabe[1], repris en 1975, qui prévoit la publication de 114 volumes, a rendu disponible un nouveau matériel pour les interprètes de Marx. Il a aussi radicalement changé l’image de certains ouvrages qui ont joué un rôle central au XXe siècle, comme par exemple les Manuscrits de 1844 et l’Idéologie Allemande, Cette édition a représenté un point de repère fondamental pour le projet, dirigé par Mario Cingoli, de la continuation de l’édition des Marx-Engels Opere complete, abandonnée par les Editori Riuniti à la fin du XXe siècle et reprise par La Città del Sole (Naples) en 2008. Dans ce cadre, 2 volumes ont été publiés : le XXII qui contient les écrits des années 1870-1871 [2], et le XXXI qui contient la remarquable traduction, par Roberto Fineschi, du premier livre du Capital en intégrant plusieurs manuscrits inédits et les variantes des quatre éditions allemandes et de la traduction française [3]. La publication d’un troisième volume, qui comprend les Cahiers ethnologiques de Marx [4], est en cours.

2Pour avoir une idée de la variété des lectures proposées par les chercheurs italiens, ces dernières années, on peut feuilleter les actes nombreux des plus importantes conférences marxiennes, qui ont eu lieu récemment en Italie (les Actes du congrès de Naples, en 2002 [5], du congrès de Bergame en 2005 [6], de Milan en 2006 [7], de Rome en 2007 [8], de Padoue, en 2008 [9]) ; il est possible de consulter aussi quelques revues, parmi lesquelles citons Critica marxista, Marxismo oggi, Quaderni materialisti et Consecutio temporum. Dans ce débat, j’ai repéré des positions interprétatives qui, pour leur netteté, me semblent paradigmatiques [10].

3Roberto Finelli, qui avait traduit et consacré à Marx des travaux importants, dans les années quatre-vingt [11], a proposé une interprétation d’ensemble de l’œuvre de Marx, dans deux volumes publiés à dix ans de distance : Un parricidio mancato. Hegel e il giovane Marx[12] en 2004, et Un parricidio compiuto. Il confronto finale di Marx con Hegel[13] en 2014. La thèse développée dans le premier livre, dont le titre fait état, est que la tentative marxienne d’« assassiner » le père, Hegel, échoue dans les écrits de jeunesse : la critique de Hegel à travers Feuerbach, le concept de Gattungswesen qui domine la scène théorique, situent Marx dans une condition de subalternité théorique par rapport à Hegel : « une longue première phase de l’œuvre de Marx et sa première théorisation du communisme sont conditionnées par une tradition d’humanisme panthéiste et symbiotique [14] ».

4Dans le second livre de Finelli, le parricide s’accomplit finalement. Cependant il ne s’agit pas du simple assassinat du père, le problème est plus complexe. D’un côté, dans le Capital, Marx règle ses comptes non seulement avec Hegel, mais aussi avec l’héritage feuerbachien, qui hantait sa philosophie ; de l’autre, tout ce processus ne peut pas être saisi à travers une lecture à « livre ouvert », mais seulement à travers ce qu’Althusser aurait appelé une « lecture symptômale » et que Finelli appelle « psychanalyse philosophique », c’est-à-dire une lecture capable de lire dans les textes ce qui est passé sous silence et qui a été refoulé. Finelli formule sa thèse en ces termes : « Pour extraire, du non-dit de Hegel et de Marx, des instruments encore utiles […] il est nécessaire d’accomplir […] un double parricide […] : c’est-à-dire, il est nécessaire d’assassiner le Marx qui, dans les formes les plus explicites et connues de sa pensée, est resté subalterne à Hegel, et que l’on fasse surgir ce Marx mûr et silencieux à sa propre auto-conscience, qui a été vraiment capable d’assassiner et de dépasser […] Hegel [15]. »

5À travers cette lecture, il s’agit de faire émerger un « Marx de l’abstraction » qui s’oppose au « Marx de la contradiction », paradigme fondamental des marxismes du XXe siècle. En ce sens, les pages consacrées par Finelli à l’Idéologie allemande et à la Préface de 1859 (textes canoniques de la fondation du matérialisme historique) sont très fortes : dans le concept de division du travail de l’Idéologie allemande, en tant que principe d’explication de toutes les réalités sociales, qu’elle soit économique, politique et culturelle, ainsi que dans le concept de contradiction entre les forces productives et les rapports de production de la Préface de 1859, Finelli voit à l’œuvre une métaphysique, « silencieuse, et pourtant influente », de la Gattung feuerbachienne et du modèle de l’inversion sujet-prédicat, dont Marx ne se libèrera jamais (Finelli interprète, en ce sens, les pages sur le fétichisme dans le Capital).

6Sa thèse est radicale : le matérialisme historique serait, en réalité, une « ontologie communautaire de l’humain », une « métaphysique biologico-collectiviste du “genre” [16] », dans laquelle la division et la contradiction jouent le rôle du concept d’aliénation, dont la syntaxe porte en elle le télos d’une plénitude finalement reconquise. Finelli voit dans ce télos le paradigme fondamental des marxismes de la contradiction. Il s’agit alors de faire surgir un autre Marx : un Marx capable de s’ériger à la hauteur du maître et de l’assassiner : le Marx de l’abstraction.

7Finelli repère les fondements de sa lecture dans quelques pages des Grundrisse connues sous le titre de Formen, die der kapitalistischen Produktion vorhergehen : « Dans ces pages, ce qui est mis de côté n’est rien moins qu’une bonne partie de la doctrine du matérialisme historique […], avec l’émergence d’une science de l’histoire qui n’utilise plus le couple […] infrastructure/superstructure, mais qui se fonde sur le couple, bien différent, du présupposé/posé [17] ». Le cercle du présupposé/posé est le paradigme qui identifie et synthétise l’essence de la société moderne, la société capitaliste, en l’opposant aux formes qui l’ont précédée : en effet, dans les sociétés précapitalistes le « présupposé » de la socialisation, ce qui lie l’individu à la communauté, n’est pas « posé » par le travail, alors que le capital a les caractères d’un sujet qui, par analogie avec le Geist hégélien, pose ses propres présupposés : « seulement dans la société moderne […] l’économique arrive à conquérir sa propre autonomie et cela est possible parce que le capitalisme se structure comme une totalité qui produit ses propres présupposés [18] ». En ce sens, il y a, d’après Finelli, « dans la connotation totalitaire du capital, en tant que processus de production de ses présupposés […] une fondation-destination structurelle de la société moderne vers le totalitarisme (plutôt que vers la démocratie) [19] ».

8Il s’agit alors d’abandonner le chemin du matérialisme historique, un « matérialisme illusoire », d’abandonner la séduction exercée par un sujet organique et collectif et par la philosophie de l’histoire qu’il porte inscrite en lui, pour pouvoir penser dans la logique du cercle présupposé/posé. À travers ce Marx, il est possible de se débarrasser du paradigme du Marx de la contradiction, qui présuppose une capacité révolutionnaire intrinsèque de la classe ouvrière, en pensant la subjectivité en tant que pauvreté absolue, séparation de la propriété. En réalité, les deux Marx cohabitent : Marx superpose pauvreté et capacité révolutionnaire [20], et seul un coup de force théorique peut les séparer : « Nous ne lisons pas – écrit Finelli – la négation, selon laquelle le travail est “non-capital”, comme capacité et force […] du travail de s’opposer au capital, mais en tant qu’exclusion-libération du monde-environnement, qui le place dans la pauvreté absolue, en le contraignant à se vendre comme valeur d’usage du capital [21] ». Ce Marx de l’abstraction et du cercle présupposé-posé ne refoule pas l’idéalisme hégélien, comme le Marx du matérialisme historique, mais il se pose finalement au niveau « théorique » de Hegel, et, à ce niveau, il peut accomplir le parricide : pour introduire le concept de force de travail il doit abandonner la synchronie catégorielle de la Science de la logique, il doit « abandonner la dialectique », pour dessiner un parcours historique à même d’expliquer l’apparition, sur la scène, de la dialectique de cette force de travail. Il s’agit alors de construire un système scientifique, la science de la modernité, où les présupposés sont posés, où le travail abstrait n’est pas le produit d’une abstraction logique, mais d’une « abstraction pratiquement vraie », selon l’expression de l’Introduction de 1857 à laquelle Finelli attribue une grande importance. L’abstrait est réel, car il n’est pas posé par l’esprit, mais par l’action d’une multitude d’hommes et de femmes ; la modalité d’être du travail, qui entre en relation avec le capital, est abstraite non pas par une opération d’abstraction logique à partir des travaux concrets, mais parce qu’il s’agit d’un travail étranger à celui qui l’accomplit, désubjectivisé : autrement dit, le travail abstrait est l’effet d’un processus historique. Mais ici, pour achever ce développement, il est nécessaire de passer de la circulation à la production, de l’argent au capital, passage dans lequel on peut, selon Finelli, retrouver par analogie le passage de la Science de la logique du Sein à Wesen, mais rien de plus qu’une simple analogie. Au contraire, c’est justement « en passant de l’argent au capital [que Marx peut] accomplir le parricide [22] » : la rencontre entre l’argent et la force de travail peut être comprise seulement à travers une reconstruction historique, l’histoire de l’accumulation primitive.

9Or, justement cette reconstruction est à la base de ce que Finelli appelle science de la modernité, c’est-à-dire un système scientifique dans lequel les présupposés sont posés, un système capable d’expliquer l’existence du travail abstrait dans la société moderne. La substitution marxienne du concept de travail avec celui de force de travail permet à Marx de formuler la critique du modèle métahistorique de l’économie politique classique, en montrant comment la force de travail est le produit spécifique de la modernité. Il s’agit d’une substitution où la théorie marxienne de la machine formulée pour la première fois dans le Manuscrit de 1861-1863, joue un rôle décisif, là où la machine n’est plus pensée selon le modèle d’instrument smithien et hégélien, résultat de la division du travail, mais en tant que rapport social qui implique en lui-même la domination. Précisément en dissipant l’ambiguïté du concept de division du travail, Marx peut formuler une science de la modernité : si, en effet, Smith confond les plans d’une division du travail qui caractérise plusieurs époques historiques, avec une spécificité de la modernité, Marx fonde sa théorie justement sur cette distinction. Il y a une division du travail médiatisée par l’argent et une division du travail médiatisée par la domination : si ces divisions indiquent des époques différentes, dans la synchronie de la société capitaliste elles indiquent l’opposition qui en constitue l’essence, entre les acteurs sociaux libres et indépendants, au niveau de la circulation, et les acteurs subalternes et dépendants, au niveau de la production. Et c’est précisément sur ce point que la théorie marxienne de la machine constitue un important garde-fou méthodologique contre toute forme d’exaltation des vertus libératrices du progrès scientifique. Il y a une discontinuité entre la manufacture et la grande industrie, entre l’instrument et la machine : « L’introduction du machinisme dissout la Verwachsung, caractéristique de la manufacture, située entre l’habilité du travailleur et l’instrument du travail, pour créer une nouvelle Verwachsung qui voit la machine non pas comme une simple chose, mais comme un système machine/force de travail, dans lequel le travail est tout à fait fonctionnel et subalterne à la machine, en tant que parallélogramme de mouvements prédéterminés [23]. » Et encore : « La machine dans la perspective du Marx du Manuscrit de 1861-63 et du Capital est une matrice à double sortie, qui d’un côté produit des objets et des biens matériels et de l’autre produit des formes d’individualités : car elle est un système de rapports de transformation physico-matérielle et, à la fois, de transformation des individualités sociales et culturelles [24]. » En ce sens, Finelli, à propos de la théorie de Marx, peut utiliser l’expression « mémoire du futur », dans la mesure où elle nous donne les clés pour comprendre notre contemporanéité.

10Comme dans les livres de Finelli, les travaux de Fineschi aussi mettent le rapport Hegel-Marx au milieu de la scène. Dans son livre de 2006, Marx e Hegel. Contributi a una rilettura[25], Fineschi propose une périodisation de l’œuvre de Marx qui puisse tenir compte des nouveaux matériaux rendus disponibles par l’édition MEGA2[26] : celle-ci permettrait de repérer « l’existence d’une stratification interne, aussi pour ce qui est de l’interprétation de Hegel », c’est-à-dire « deux lectures, la première de la jeunesse, directement influencée par la gauche hégélienne et par le milieu culturel du Vormärz » et « la seconde, autour de 1857, période au cours de laquelle Marx écrit sa première grande ébauche du mode de production capitaliste [27] ». Le préalable de tout le travail de Fineschi est la distinction entre « Hegel » et le « Hegel interprété par Marx » : il est nécessaire, selon l’auteur, de sortir « de la perspective interprétative de Marx [28] » pour être à même de poser de façon correcte le problème de la méthode marxienne et de sa relation avec la pensée de Hegel. Pour ce qui est de l’interprétation du jeune Marx et, en particulier, des catégories d’Entäusserung et d’Entfremdung, Fineschi identifie chez Bauer et Feuerbach les lunettes à travers lesquelles ces catégories sont pensées, en produisant une « distorsion substantielle [29] » qui fait de Hegel une sorte de philosophe de l’auto-conscience absolue. Il s’agit alors de séparer le problème du jugement de Marx sur Hegel, du problème de la « présence et du fonctionnement de la dialectique chez Marx [30] » : sur ce dernier point, Fineschi souligne le fait que la structure de la théorie du « capital » s’avère être le développement dialectique de la « cellule économique fondamentale », la marchandise, à partir de la contradiction, qui lui est immanente, entre valeur d’usage et valeur. Cette dialectique, logique spécifique de l’objet spécifique (formulation que Fineschi reprend de la Kritik et qu’il utilise avec insistance), n’est pas l’application d’une forme à un contenu qui lui serait extérieur, mais le développement de « la chose elle-même », qui se rattache, pour toute une série de catégories (opposition et contradiction, posé et présupposé, développement et processus, essence, apparence et phénomène) à la « logique de Hegel [en tant que] formulation la plus proche d’une tractation pure, abstraite, des lois de la dialectique disponibles en ces temps [31] ».

11Cette valorisation de la méthode dialectique conçue comme développement de la « chose elle-même », se trouve au centre de la lecture du Capital que Fineschi propose dans son livre de 2001, Ripartire da Marx. Processo storico ed economia politica nella teoria del Capitale [32].

12La lecture de Fineschi est menée à partir des nouveaux textes rendus disponibles par la section II des MEGA, notamment « les manuscrits originaux sur lesquels Engels a travaillé pour la publication des livres II et III du Capital, la partie du Manuscrit de 1861/1863 qui précède la théorie de la plus-value et celle qui la suit, tous les extraits et les notes sur lesquels Marx a travaillé, et beaucoup d’autres encore [33] ». Selon Fineschi, c’est seulement sur cette nouvelle base qu’il est possible de « donner une interprétation philologiquement rigoureuse de la théorie marxienne et de ses interprétations traditionnelles [34] ».

13À la lumière de ce nouveau matériel philologique, Fineschi définit le contenu de la théorie marxienne : il s’agit « d’un modèle logique, à un haut niveau d’abstraction, du fonctionnement “historico-naturel” du mode de production capitaliste [35] ». Il s’agit d’un modèle unitaire, développé à partir de la contradiction immanente à la cellule fondamentale du mode de production capitaliste, la marchandise : cette contradiction « a traversé tous les niveaux de l’exposition, en déterminant le développement de la forme de valeur, l’accumulation, la reproduction sociale globale, la détermination de la valeur de marché et, donc, du prix de production, la crise, la généralisation du fétiche du capital, jusqu’à poser leur opposition au niveau d’abstraction le plus bas de la théorie du capital en tant que tel : la société par actions face à l’intégration généralisée de la production matérielle [36] ». Dans le « développement dialectique de la chose elle-même », comme l’écrit Fineschi, on peut distinguer quatre niveaux d’abstraction, qui correspondent à quatre modèles : le premier modèle est celui de la circulation, en tant que présupposé du mode de production capitaliste, qui est cependant « seulement phénoménal, en tant qu’il ne pose pas ses présupposés » et il y a « donc la nécessité de passer à un autre modèle [37] » ; le deuxième modèle est celui de l’universalité, c’est-à-dire du capital global dans l’unité de production et de circulation ; le troisième modèle est celui de la particularité, dans laquelle les différents capitaux du modèle deux, ne sont plus pensés à travers la clause de la coïncidence de la production et de la consommation, mais à travers la concurrence entre eux ; finalement, le quatrième modèle est celui de la singularité, dont l’exemple le plus clair est le capital productif d’intérêt, dans lequel se produit « le fétichisme du capital, [la croyance selon laquelle] il produit en lui-même un intérêt [38] ». Cette structure logique renvoie, d’après Fineschi, à la troisième section de la Science de la logique de Hegel, « La doctrine du concept » et cependant il ne s’agit pas d’une application extérieure de la méthode à la chose, mais il s’agit de l’articulation dialectique du contenu « spécifique » selon l’universalité, la particularité et la singularité.

14En soulignant le risque implicite d’une approche exclusivement philologique, qui aurait comme prétention la « récupération d’un Marx pur et non corrompu [39] », Riccardo Bellofiore présente non seulement une interprétation de l’argumentation du Capital, mais aussi sa « personnelle reconstruction et développement d’elle [40] » : à cet égard, Bellofiore nous indique les auteurs fondamentaux – Napoleoni et Graziani – qui lui ont permis de tracer son propre parcours dans l’œuvre de Marx. En partant de Napoleoni, Bellofiore met en valeur la lecture du travail abstrait, qui est en même temps le travail privé, qui devient social seulement avec l’échange universel des marchandises, mais aussi le travail salarié, dominé par le capital ; il met aussi en valeur, en partant de Graziani, la lecture monétariste de la théorie de la valeur.

15Avec ces instruments, Bellofiore propose une lecture des premiers chapitres du Capital. En commentant la première section, il souligne le fait que la valeur est un spectre qui doit « s’incorporer », « s’incarner » (expressions, souligne Bellofiore, que Marx utilise pour le travail concret, alors que le travail abstrait est « contenu » dans la valeur). Or, l’expression « valeur incorporée » vaut, en particulier, pour le travail concret qui s’incorpore dans l’or en tant qu’argent-marchandise, qui est une « Materiatur » de la valeur en argent. En soulignant l’usage de ce terme ancien, Bellofiore fixe un premier point-clé de son interprétation : « Si les choses en sont ainsi, comme l’a compris Rubin, il faut dire que le travail abstrait, en tant qu’activité, et la valeur, en tant que résultat, existent déjà, dans une forme latente, dans la phase de la production immédiate. Il y a transition de la puissance à l’acte, dans la phase de la circulation, dans l’échange sur le marché final des marchandises, où l’argent confère une réalité effective à ces grandeurs fantasmatiques [41] ». Donc, la marchandise est déjà argent, même si, d’une façon idéale, le prix est la forme d’argent des marchandises : « le travail immédiatement privé, qui produit les marchandises devant être l’objet de la “vente”, se reflète dans cet unique travail concret qui vaut comme étant immédiatement social et qui produit l’argent effectuant “l’achat”. En vertu de ce procès, le travail abstrait dans la marchandise se valide en tant que travail médiatement social, à l’intérieur de la circulation, dans l’échange avec l’argent [42] ». Bellofiore souligne que le travail concret qui produit l’or en tant qu’argent est la seule valeur immédiatement sociale, et que, dans le cas de l’or, on est devant une vente sans achat : à la source, l’or entre en circulation à travers un troc et il représente de ce fait les prix des marchandises. À partir de là les grandeurs monétaires des marchandises peuvent être anticipées de façon idéale.

16Dans la première section du Capital, la circulation est simple. On a donc affaire à une économie pleinement capitaliste, où les travaux privés se réfèrent à des entreprises capitalistes en concurrence entre elles alors que l’analyse est menée en supposant le processus de production achevé. À partir du chapitre 4, rentrent en scène les rapports de production. Le travail se révèle alors comme force de travail. Or, sans travail vivant, sans achat-vente de la force de travail, il n’y a pas de (néo)valeur. Cependant, l’extraction de la valeur, médiatisée par le processus monétaire, n’est pas évidente, ni garantie, mais liée au fait, selon l’expression de Bellofiore, « de gagner la lutte des classes ». À ce propos, Bellofiore met en lumière un point que Marx n’arrive à élaborer que de façon incomplète : le fait que la monnaie-crédit, le financement du système bancaire qui permet aux producteurs l’achat de la force de travail, est indépendant de la référence à l’argent en tant que marchandise : « il est légitime de voir dans le financement (bancaire) pour la production (des entreprises capitalistes) une validation monétaire anticipée par des travaux concrets qui ont lieu dans les processus de travaux capitalistes en compétition, sur les bases des attentes, eu égard à la lutte des classes et à la tendance de la demande. Dans ce cas la forme imprime le sceau capitaliste, comme un pari sur le futur, qui rend immédiatement commensurables les performances du travail, en tant que travaux qui produisent de l’argent en puissance. Et un tel argument peut et doit être développé en dehors d’une théorie de l’argent en tant que marchandise [43] ».

17Par conséquent, les concepts de « travail nécessaire » et de « surtravail » doivent être redéfinis à partir du fait que le revenu produit exprime monétairement le temps de travail globalement livré ou extrait si les prix attendus trouvent confirmation sur le marché (en cas contraire, l’expression monétaire change ex post), ce qui est évident : nous avons alors l’actualisation de l’exploitation dans la circulation.

18Pour résumer avec les métaphores que Bellofiore tire de Marx : la valeur avant l’échange est un spectre, un fantôme, le capital est un vampire et c’est seulement grâce à ce caractère que la chrysalide – l’incarnation dans le corps de l’argent du fantôme de la valeur – peut devenir papillon, « valeur qui génère plus valeur [,] travail mort qui retourne à la vie, et amasse toujours plus de valeur morte [44] ». Or, c’est justement ce caractère de vampire du capital qui empêche de le penser comme une totalité fermée sur elle-même, un cercle sans extérieur qui s’auto-valorise : là où Marx est plus proche de Hegel, là est aussi la distance majeure par rapport à lui, car « la valeur et l’argent ne grandissent pas par parthénogenèse idéale, car, en tant que travail mort, ils réussissent à inclure “matériellement”, à l’intérieur d’eux-mêmes et à dominer sous une forme particulière de mise au travail, cette altérité qui est la force humaine du travail, “collée” aux travailleurs en chair et en os [45] ».

19Les deux volumes de Luca Basso : Socialità e isolamento : la singolarità in Marx[46], de 2008, et Agire in comune. Antropologia e politica nell’ultimo Marx[47](de 2012, sont aussi consacrés à une interprétation globale de l’œuvre de Marx. Le point de départ du premier volume est le concept de singularité, terme qui n’appartient pas au vocabulaire de Marx, mais que l’auteur puise dans la philosophie française contemporaine, en l’utilisant comme un réactif chimique pour produire des effets interprétatifs nouveaux : « la raison pour laquelle l’utilisation de la catégorie [de singularité] se révèle productive réside dans le fait qu’elle permet, à l’intérieur du dispositif marxien, de souligner l’élément de l’épanouissement individuel, en mettant à la fois en lumière sa distance par rapport à la conception moderne de l’individualité [48] ». Le concept de singularité permet de contourner l’opposition moderne entre atomisme et holisme, en mettant en valeur la dimension de la relationnalité. Le concept de singularité doit alors être pensé en connexion étroite avec celui de transindividualité (que Basso reprend de Simondon, à travers la médiation de Balibar), dans la mesure où celui-ci indique le primat des rapports sur les individus. Cependant, Basso souligne avec force que cette conception ne doit pas hypostasier l’élément de la relation : « la singularité est unique, irréductible à un modèle universel, [toujours] connecté avec une situation et un contexte déterminés [49] ». La singularité doit donc être pensée, non seulement à travers la catégorie de relation, mais aussi à travers celles de contingence et de conflit : voilà pourquoi le discours sur la singularité est traversé, de part à l’autre, par un « penser dans la conjoncture », dont la nature est constitutivement « polémique ».

20À la lumière de ces coordonnées théoriques, Basso trace un parcours dans l’œuvre de Marx qui va de l’Idéologie allemande aux Grundrisse. Dans la première, Basso saisit un élément fondamental de discontinuité avec la production théorique précédente : « la modalité par laquelle l’Individuum est conçu dans l’Idéologie allemande, avec son insertion dans une activité productive déterminée, et donc, dans un contexte spécifique, social et politique, constitue un dépassement de la position précédente […] centrée sur l’homme, dans sa connexion avec l’étant générique [50] ». Or, la conquête de la Bestimmung en tant que centre conceptuel du discours sur l’Individuum est, certes, théorique, mais elle ne peut être comprise qu’en relation avec la conjoncture politique : elle émerge, d’après Basso, de la confrontation marxienne avec la sphère pratique, avec la lutte politique, dans laquelle la révolte des tisserands silésiens et le mouvement chartiste jouent un rôle primaire. L’élaboration théorique de ces expériences politiques pousse non seulement Marx au-delà de la solution feuerbachienne du rapport individu-collectivité, mais le préserve aussi de toute substantialisation ontologique ou sociologique du prolétariat : le prolétariat s’individualise à travers un agir commun dans une conjoncture conflictuelle. De telle façon que l’être en commun ne s’hypostasie pas dans la communauté, il est toujours in fieri, toujours suspendu aux modalités concrètes des unions des travailleurs et de leurs pratiques de lutte.

21Ce thème est repris dans les Grundrisse sur un plan nouveau, celui de la critique de l’économie politique. Or, selon Basso il ne faut pas lire cet ouvrage, véritable work in progress, selon des modules dialectiques, d’ailleurs présents, si l’on ne veut pas risquer de manquer la signification théorique et politique de la réflexion marxienne : l’universalité partisane du prolétariat se soustrait à n’importe quelle dialectique. De la critique de l’économie politique on ne peut pas déduire une politique, car la politique se donne toujours dans l’élément de la contingence. À partir de ce cadre, Basso met en valeur la centralité du concept d’individualité dans son ambivalence structurelle : en effet « autant la société, en tant que complexe articulé de rapports, que l’individualité, entendue au sens fort, constituent pour Marx des signes distinctifs du capitalisme, le vrai novum par rapport au passé. […] À partir du fait que la société bourgeoise se configure comme la “dépendance mutuelle et généralisée des individus réciproquement indifférents”, le rapport social présente l’isolement individuel comme étant son côté autre [51] ». Autrement dit, l’individu n’est pas une base ontologique de la société capitaliste, mais son effet historique, effet ambivalent, qui contient en soi, non seulement les caractères de l’assujettissement du travail vivant à la valorisation capitaliste, mais aussi des potentialités politiques conflictuelles. Certes, dans l’Idéologie allemande, et aussi dans les Grundrisse, on trouve des éléments qui peuvent être ramenés à une philosophie de l’histoire.

22Cependant le pari interprétatif de Basso consiste en la valorisation de l’élément de la conjoncture et du conflit, tout en soulignant « la continuité entre la thématique des “individus comme individus” du premier texte et celle des “individus sociaux” du second [52] ».

23Le deuxième volume met à l’épreuve cette lecture, autour de ce que Basso appelle le « dernier Marx », en enquêtant sur « la relation entre la dimension individuelle et la dimension commune, et donc l’entrelacement entre individu, classe, société, communauté, dans la théorisation marxienne à partir des année soixante [53] ». L’objet du questionnement est, d’un côté, le Capital, de l’autre, les écrits historico-politiques de la dernière phase, consacrés à des réflexions sur l’État et sur l’action politique de la classe ouvrière, mais il se réfère aussi aux textes qui se rapportent à des conjonctures spécifiques, comme les célèbres analyses sur la situation russe, et encore les Cahiers ethnologiques. Le centre d’intérêt est toujours le rapport individu-communauté dans le mode de production capitaliste : ce rapport se fonde « sur un élément de séparation structurelle » entre individu et communauté, séparation, non seulement des individus des moyens de production, mais aussi de leur capacité de travail. Dans ce scénario émerge toute l’ambivalence du travail vivant : il est à la fois l’élément de la valorisation du capital, mais aussi, en puissance, de l’opposition au capital. Et c’est précisément cette ambivalence qui constitue un garde-fou méthodologique fondamental contre toute conception ontologique ou sociologique de la classe sociale : la classe est une notion intrinsèquement politique, qui se constitue dans un « agir commun » ne pouvant pas être hypostasié, en lui imposant le télos anhistorique d’une société communiste transparente et dépourvue de conflits. Cette action doit être pensée à chaque fois dans la conjoncture et le conflit : « le Gemeinwesen ne peut pas être déterminé une fois pour toutes, il doit être continuellement recalibré à l’intérieur des situations concrètes où il s’insère, sur la base d’une ouverture continue à la rectification de son parcours [54] ». Les analyses de Basso font émerger une politique marxiste irréductible aussi bien à l’anarchisme de Bakounine qu’à l’étatisme de Lassalle : « Une politique prolétaire, en tant que pratique de transformation, se lie aux luttes menées pour le changement des conditions de travail, dans lesquelles commencent à se manifester des “traces” de communisme, mais elle va à la fois au-delà d’un tel horizon. Ainsi le communisme apparaît non pas comme un résultat obligé du processus historique, ni comme une dialectique de la “négation de la négation”, mais comme un problème ouvert pour l’avenir, dans sa tentative d’articuler de nouvelles formes de rapports sociaux, qui tiennent ensemble le caractère antagonique du mouvement et la conscience de la nécessité d’une institution, dans laquelle existent des éléments d’autorité, mais pas selon une hiérarchie historiquement définie, et l’“agir commun” des singularités ouvrières qui puisse trouver une “condensation” politique adéquate à leurs besoins et à leurs capacités [55] ».

24Le volume de Massimiliano Tomba, publié en 2010 : Strati di tempo. Karl Marx materialista storico[56] est consacré à une relecture de l’œuvre de Marx focalisée sur l’histoire, Le titre du livre est une allusion évidente aux Zeitschichten de Koselleck, dont on peut percevoir l’influence. Et cependant, si l’on ne se borne pas à un regard superficiel, on pourra saisir une influence beaucoup plus profonde dans cette lecture, Bloch et Benjamin : d’un côté, le Benjamin de la critique au processus historique qui parcourt un « temps homogène et vide », de l’autre le Bloch des Ungleichzeitigkeiten, lus l’un dans l’autre, l’un réfléchi par l’autre. Avec ces lunettes conceptuelles, Tomba « brosse à rebrousse poil » l’œuvre de Marx, en faisant émerger des aspects nouveaux : en particulier, une réflexion sur la pluralité des temps historiques qui, loin d’être ordonnés en tant qu’époques successives d’une philosophie de l’histoire, peut être pensée à travers la métaphore géologique des couches, qui permet de saisir la « coprésence de temporalités sur une surface [57] ». Cette pluralité, souligne Tomba, n’est jamais analysée avec un regard objectivant, « scientifique », mais avec un œil partisan, à travers l’élaboration d’une historiographie du « présent » menée du côté du prolétariat, une historiographie capable de saisir, dans la stratification des temps, les alternatives à la modernisation capitaliste, qui peuvent être réactivées.

25Cette perspective interprétative est mise à l’épreuve des derniers écrits de Marx : la confrontation avec les populistes russes sur l’obscina, les études ethnologiques et le chapitre du Capital consacré à l’accumulation primitive. De ces écrits émerge, pour Tomba, une conception de l’histoire multilinéaire, qui met en relief l’inadéquation de l’hypothèse des stades successifs : le problème fondamental de Marx est « la coprésence et la friction entre couches historico-temporelles capables de produire un chemin alternatif à celui de la modernisation capitaliste [58] ». Tomba conclut alors que « si Marx abandonne l’idée d’un stade asiatique stationnaire et la conception correspondante de la force émancipatrice et civilisatrice du capital, encore présente jusqu’aux écrits des années cinquante, ce changement de perspective est dû aussi à une vision libérée de l’idée de progrès, ainsi capable de saisir le côté destructif des êtres humains autant que de la nature du processus de valorisation : Marx saisit le progrès non pas en tant que potentiel de libération, mais en tant que potentiel d’exploitation du travail ; finalement, à un niveau analytique, il a désormais clairement à l’esprit la combinaison mondiale entre les différentes modalités d’extorsion de plus-value [59] ». Justement l’analyse de cette combinaison des modalités d’extorsion de plus-value se révèle être, selon Tomba, fondamentale pour comprendre la contemporanéité qui est la nôtre, laquelle, loin d’être dominée par une temporalité simple, se montre comme un entrelacement complexe de temps où, dans le processus de valorisation du capital, on saisit la « combinaison de plus-value absolue et relative et des formes d’exploitation les plus différentes, dans un marché mondial où aucune forme peut être considérée arriérée ou résiduelle [60] ».

26***

27« Pas plus qu’on ne choisit son temps, on ne choisit ses maîtres [61] », disait Althusser. Il a fallu à Marx une vie entière d’études et de recherches, de luttes théoriques et politiques, pour régler ses comptes avec ces maîtres extraordinaires que furent Feuerbach et Hegel, Smith et Ricardo.

28Et pourtant, pour devenir Marx, il lui fallait régler ces comptes-là. « L’objet du Capital », en ce sens, constitue bel et bien un point de non-retour : il faut penser l’objet théorique de Marx en discontinuité radicale, autant avec l’historicisme hégélien qu’avec l’économie politique classique. Or, dans l’effort original des études sur Marx en Italie ces dernières années, on peut s’apercevoir sinon de la lettre (la périodisation de l’œuvre, l’insistance sur le couple science-idéologie), du moins de l’esprit de cette position : non seulement un Marx est souvent joué contre un autre, mais il est aussi joué au-delà de ce qui est « dit » explicitement, là où l’interprète est conduit par la rigueur de sa pensée. C’est justement cet au-delà que visait la lecture symptômale, un au-delà que les lectures italiennes de ces dernières années ont contribué à « produire », dans le double sens du mot.

Notes

  • [*]
    Professeur d’Histoire de la philosophie à l’Université de Milan « Bicocc », département de Sciences Humaines pour la Formation « Riccardo Massa ».
  • [1]
    L’initiateur des études sur l’éd. MEGA en Italie a été Angelo Mazzone, dont on peut voir (éd. par), MEGA2 : Marx ritrovato, Roma, Mediaprint, 2013 (1re éd. 2002), travail qui a été continué par son élève Roberto Fineschi dont on peut voir sur ce thème Un nuovo Marx. Filologia e interpretazione dopo la nuova edizione storico-critica (MEGA2), Roma, Carrocci, 2008.
  • [2]
    Marx-Engels, Opere complete, éd. par M. Vanzulli, vol. XXII, Napoli, La Città del Sole, 2008.
  • [3]
    Marx-Engel, Opere complete, éd. par R. Fineschi, vol. XXXI, Napoli, La Città del Sole, 2011.
  • [4]
    Marx-Engel, Opere complete, éd. par F. Vidoni e S. Bracaletti, vol. XXVII (en cours de publication). Des Cahiers ethnologiques, il faut signaler la première traduction italienne par Politta Foraboschi : K. Marx, Quaderni antropologici. Appunti da L.H. Morgan e da H.S. Maine, Milano, Unicopli, 2009.
  • [5]
    M. Musto (éd.), Sulle tracce di un fantasma. L’opera di Karl Marx tra filologia e filosofia, Roma, manifestolibri, 2005.
  • [6]
    R. Bellofiore (éd.), Da Marx a Marx ? Un bilancio dei marxismi italiani del Novecento, Roma, manifestolibri, 2007.
  • [7]
    M. Cingoli, V. Morfino (ds.), Aspetti del pensiero di Marx e delle interpretazioni successive, Milano, Unicopli, 2011.
  • [8]
    C. Arruzza (éd.), Pensare con Marx, ripensare Marx. Teorie per il nostro tempo, édité par C. Arruzza, Edizioni Alegre, Roma, 2008.
  • [9]
    D. Sacchetto, M. Tomba (éd.), La Lunga Accumulazione originaria. Politica e lavoro nel mercato mondiale, Verona, Ombre corte, 2008.
  • [10]
    Pour une analyse détaillée des lectures de Marx en Italie dans ces dernières années, cf. T. Redolfi Riva, Critica dell’economia politica ed esposizione dialettica. Su alcune recenti letture italiane di Marx, « Il Ponte », LXIX (2013), 5-6, p. 219-245 et G. Sgrò, Dialettica, prassi e concezione materialista della storia. Alcune recenti letture di Marx, ibid, p. 266-287. Pour insérer les interprétations des dernières années dans le contexte de l’histoire des marxismes italiens, cf. C. Corradi, Storia dei marxismi in Italia, Roma, manifestolibri, 2005.
  • [11]
    Il faut citer ici au moins l’édition par Trincia de K. Marx, Critica del diritto statuale hegeliano, Roma, Edizioni dell’Ateneo, 1983, et le livre Astrazione e dialettica dal romanticismo al Capitale, Roma, Bulzoni, 1987.
  • [12]
    Torino, Boringhieri, 2004.
  • [13]
    Milano, Jaca Book, 2014.
  • [14]
    R. Finelli, Un parricidio mancato. Hegel e il giovane Marx, op. cit., p. 228.
  • [15]
    Ibid., p. 36.
  • [16]
    Ibid., p. 76.
  • [17]
    Ibid., p. 42.
  • [18]
    Ibid., p. 54.
  • [19]
    Ibid., p. 54.
  • [20]
    Finelli note comme « l’exposition de Marx entrelace et confond » la négation historicosociale et la négation ontologique (Ibid., p. 161).
  • [21]
    Ibid., p. 123.
  • [22]
    Ibid., p. 162.
  • [23]
    Ibid., p. 183-184.
  • [24]
    Ibid., p. 184.
  • [25]
    Roma, Carocci, 2006.
  • [26]
    Ibid., p. 11-15.
  • [27]
    Ibid., p. 17.
  • [28]
    Ibid., p. 19.
  • [29]
    Ibid., p. 20.
  • [30]
    Ibid., p. 185.
  • [31]
    Ibid., p. 186. Il est tout- à fait intéressant qu’en tant que modèle de relation entre logique générale et logique spécifique, Fineschi utilise le rapport entre la Science de la logique et la Philosophie du droit à l’intérieur de la philosophie hégélienne (cf. p. 164-165).
  • [32]
    Napoli, La Città del Sole, 2001.
  • [33]
    Ibid., p. 13.
  • [34]
    Ibid.
  • [35]
    Ibid., p. 15.
  • [36]
    Ibid., p. 430.
  • [37]
    Ibid., p. 426.
  • [38]
    Ibid., p. 428.
  • [39]
    R. Bellofiore, « La crisalide e la farfalla. Una rilettura della teoria economica marxiana e un bilancio delle discussioni dagli anni’60 ad oggi », in M. Cingoli, V. Morfino (éds.), Aspetti del pensiero di Marx e delle interpretazioni successive, op. cit., p. 188.
  • [40]
    R. Bellofiore, « Marx e la fondazione macro-monetaria della microeconomia », in R. Bellofiore, R. Fineschi, Marx in questione. Il dibattito “aperto” dell’International Symposium on Marxian Theory, Napoli, La Città del Sole, 2009, p. 152.
  • [41]
    R. Bellofiore, « Con Marx contro Marx. Teoria del denaro e teoria del valore, un dialogo con Hans Georg Backhaus », in H.G. Backhaus, Dialettica della forma valore, éd. par T. Ridolfi Riva et R. Bellofiore, Roma, Editori Riuniti, 2009, p. 63.
  • [42]
    Ibid., p. 65.
  • [43]
    Ibid., p. 71.
  • [44]
    R. Bellofiore, « La crisalide e la farfalla. Una rilettura della teoria economica marxiana e un bilancio delle discussioni dagli anni’60 ad oggi », op. cit., p. 195.
  • [45]
    Ibid, p. 191. Sur le thème du rapport Marx-Hegel voir aussi R. Bellofiore, Il Capitale come Feticcio Automatico e come Soggetto, e la sua costituzione : sulla (dis)continuità Marx-Hegel, « Consecution temporu », 5 (2013). Cf. « Marx dopo Hegel. Il capitale come totalità e la centralità della produzione », in M. Mursto (éd. par), Sulle tracce di un fantasma. L’opera di Karl Marx tra filologia e filosofia, op. cit., p. 253-267.
  • [46]
    Roma, Carrocci.
  • [47]
    Verona, Ombrecorte.
  • [48]
    Luca Basso, Socialità e isolamento : la singolarità in Marx, op. cit., p. 9.
  • [49]
    Ibid., p. 11.
  • [50]
    Ibid., p. 17.
  • [51]
    Ibid., p. 29.
  • [52]
    Ibid., p. 31.
  • [53]
    Ibid.
  • [54]
    Ibid., p. 11.
  • [55]
    Ibid., p. 214.
  • [56]
    Milano, Jaca Book.
  • [57]
    M. Tomba, Strati di tempo. Karl Marx materialista storico, op. cit., p. 277-278.
  • [58]
    Ibid., p. 277.
  • [59]
    Ibid.,, p. 290.
  • [60]
    D. Sacchetto, M. Tomba, « Introduzione » à Id. (éd.), La Lunga Accumulazione originaria. Politica e lavoro nel mercato mondiale, op. cit., p. 10.
  • [61]
    L. Althusser, L’Avenir dure longtemps suivi de Les Faits, Paris, Éditions Stock/IMEC, 1992, p. 326.