La Théorie critique aujourd’hui : usages et déclinaisons

1 Depuis maintenant cent ans, l’Institut de recherche sociale de Francfort entreprend et développe une critique radicale de la modernité capitaliste. Son programme de recherche avait l’ambition de penser de manière dialectique les processus sociaux et de mettre au jour les contradictions de la société moderne européenne et de sa tradition intellectuelle. La Théorie critique des années trente [1], élaborée au sein de l’Institut, comprenait la crise de son époque comme caractérisée par l’effondrement à la fois des médiations institutionnelles (le droit, la loi, la société civile, l’État rationnel, etc.) et des médiations subjectives (par exemple la capacité de jugement et l’esprit critique) entre la liberté de l’individu et la domination de l’État [2]. Au début des années quarante, les théoriciens francfortois (notamment Herbert Marcuse, Otto Kirchheimer, Franz Neumann, Friedrich Pollock, Max Horkheimer) s’évertuaient à analyser et comprendre les fascismes en essayant de développer avant tout une théorie de l’État fasciste ou national-socialiste et de son rapport avec le capitalisme libéral et la modernité bourgeoise [3]. Dans son article « L’État autoritaire », par exemple, Horkheimer ne se limitait pas à souligner le lien entre le fascisme, l’État et le pouvoir de classe capitaliste, mais cherchait à identifier les germes de la montée du fascisme dans les événements et les transformations de l’Europe moderne ; il mettait également au jour ces facteurs qui entravaient le passage à l’action sur le plan théorique et institutionnel [4].

2 La Théorie critique visait certainement à donner lieu à une société rationnelle, c’est-à-dire à une société qui, s’appuyant sur les principes de l’universalité et de l’autonomie, parvient à satisfaire équitablement les besoins humains et à supprimer l’injustice sociale. Toujours est-il qu’à la lumière du programme de recherche dont Horkheimer avait tracé les contours dans les années trente, pour changer le présent, et donc pour faire face aux contradictions internes des relations socio-économiques, il était essentiel de comprendre l’évolution historique de la société bourgeoise et des idées philosophiques qu’elle avait produites. Mais les théoriciens de l’Institut de recherche sociale de Francfort ne jugeaient pas de manière critique ce qui « est » d’un point de vue abstrait : en analysant les soubassements économiques de la société moderne et leurs contradictions, ils montraient que le contexte génère, lui-même, une attitude critique envers ces relations qui le structurent. S’inscrivant dans le sillage de Marx, mais se distançant du holisme marxiste-hégélien, ces auteurs pensaient que les contradictions au sein de la science et les antinomies de la philosophie sont fonction de celles, plus larges, de la société dans sa totalité [5].

3 Les théoriciens de la première École de Francfort – notamment Horkheimer, Adorno et Marcuse – ont élaboré une anthropologie de l’homme moderne profondément aliéné dans les rouages de la société bourgeoise, dépourvu d’autonomie, accoutumé à sacrifier le plaisir à la discipline de la production et sous l’emprise du diktat de la consommation [6]. D’ailleurs, on connait bien la trajectoire de la Théorie critique au cours des années quarante, surtout avec la dialectique de la raison : cet ouvrage marquait notamment un tournant dans le projet francfortois, et notamment le passage d’une théorie psychosociale de la société à une critique élargie du legs des Lumières comme processus continu de la civilisation occidentale [7]. À cet égard, Habermas a mis l’accent sur la « contradiction performative » qui traverse l’ouvrage de Horkheimer et Adorno : la raison, en tant que raison instrumentale, s’est assimilée au pouvoir, renonçant ainsi à sa propre force critique ; c’est le dernier dévoilement d’une critique de l’idéologie appliquée à elle-même. On aurait affaire là, de façon paradoxale, à l’autodestruction de la capacité critique, car, à l’instant où l’on dénonce le caractère instrumental et totalitaire de la raison moderne, on doit encore faire usage de la raison critique [8]. Pour le dire autrement, si la raison est totalitaire, et la société totalement fausse et aliénée, il est bien difficile d’invoquer des raisons pour fonder une critique de la société, des raisons qui devraient être à même d’échapper à l’emprise totale de cette raison humaine instrumentale et totalitaire. Voici l’écueil que Habermas essaie de contourner : son projet a consisté à remettre en cause la thèse d’une perversité totale de la raison et à cerner une alternative à ce destin [9], mais d’autre part il s’agissait de sauver les Lumières aussi pour Horkheimer et Adorno [10].

4 Au cours de ces deux premières décennies du nouveau siècle, certains philosophes se sont penchés sur les idées et les ambitions qui animaient le projet originaire d’une Théorie critique de la société – ce projet partiellement remis en cause par Habermas [11] – et ont essayé de reformuler et de renouveler ce corpus théorique en fonction des exigences de notre temps. Prenons par exemple la critique du capitalisme en tant que forme de vie élaborée par Jaeggi [12]. L’auteure, dépassant le cadre de la distinction habermassienne entre monde vécu et système économique, renoue avec l’idée horkheimerienne de thématiser l’économie au sens large, présentée dans l’article « Théorie traditionnelle et théorie critique » (1937). Le travail de Jaeggi, qui met en avant l’exigence de repenser les carences constitutives des structures socio-économiques de nos sociétés, peut fournir des pistes de réflexions intéressantes si l’on examine aussi sa relecture des Minima moralia (1947) d’Adorno : elle propose de développer une critique des « formes de vie », ces dernières constituant des « ensembles de pratiques » où se joue la « reproduction culturelle et sociale de la vie humaine [13] ». Adorno lui permet de définir les contours d’une critique qui ne s’appuie pas sur l’utopie d’un modèle positif du bien qui serait anhistorique et détaché des formes concrètes des rapports humains [14]. En effet, elle se caractérise comme une critique déterminée de moments sociaux et repose sur « l’idée constamment renouvelée d’une société correcte [15] ». Ainsi la critique se construit-elle au nom de critères présents au sein des formes de vie, dans l’effectivité sociale elle-même [16].

5 Une autre piste de recherche intéressante est ouverte par Amy Allen et Rocío Zambrana : c’est l’approche décoloniale de la théorie critique. Allen met en évidence les limites de la théorie critique francfortoise du fait qu’elle épouse les contours des stratégies fondationnalistes et/ou euro-centriques pour fonder la normativité. Elle vise à réimaginer une théorie critique décolonisée après la « fin du progrès », en déplaçant la focale de Habermas, Honneth et Forst vers Adorno et Foucault, car ces derniers portent un regard plus ambivalent sur le progrès, la raison et les Lumières. Allen déconstruit la conception du progrès considéré comme un « fait », cette notion de progrès constituant la norme de la modernité européenne : négligeant le rôle que la relation matérielle et idéologique entre l’Europe et ses colonies a joué dans la formation de la modernité en tant que construction raciale, le mythe du progrès remplit la fonction idéologique de rationalisation et de légitimation des formes contemporaines d’impérialisme informel, de néocolonialisme et de racisme [17]. Dans cette optique, on peut relire sous un nouvel angle la dialectique de la raison (1947). Adorno et Horkheimer sapent les fondements de toute philosophie de l’histoire prétendant connaître le telos du développement historique et mettent au jour la contradiction profonde des sociétés occidentales : la rationalité est à la fois liberté et domination [18]. Se réclamant des travaux d’Anibal Quijano et de Santiago Castro-Gómez, Zambrana remet en question l’hypothèse selon laquelle la rationalité prend appui sur une logique homogène et la modernité peut être comprise comme un développement unique et cohérent ; ainsi remarque-elle que les critiques de la modernité élaborées au sein de la tradition libérale et celles de la tradition marxiste adoptent une perspective euro-centrique [19]. En effet, le binôme modernité-rationalité se configure comme « un paradigme universel de la connaissance et de la relation entre l’humanité et le reste du monde [20] ».

6 D’autres philosophes et sociologues essaient de renouer avec la Théorie critique de Horkheimer et Adorno en prenant parfois le contre-pied des derniers représentants de l’École de Francfort, notamment Honneth. On peut ici évoquer Estelle Ferrarese, Marcos Nobre, Stathis Kouvélakis et Alain-Patrick Olivier. Estelle Ferrarese questionne le rapport entre la théorie critique d’Adorno et les théories du care (du « soin des autres »), en expliquant comment elles peuvent se renforcer mutuellement, et ce, à partir du constat que l’organisation sociale perpétue les privilèges des groupes dominants en instrumentalisant le travail du care largement féminin, gratuit et qui implique aussi de devoir porter un « lourd poids psychologique [21] ». Se proposant de repenser à nouveaux frais les assises de la Théorie critique, tout en gardant ses principes fondamentaux, en premier lieu l’orientation vers l’émancipation, Marcos Nobre se réclame de la distinction horkheimerienne entre théorie traditionnelle et théorie critique pour évaluer la légitimité des attitudes critiques de nos jours et reconfigurer le rapport entre théorie et pratique [22]. Dans son dernier ouvrage, Stathis Kouvélakis, d’une part, essaie de comprendre les raisons qui ont conduit à l’abandon progressif du projet originaire de l’École de Francfort, qui consistait à élaborer une critique radicale des sociétés capitalistes ; d’autre part, il remarque que la théorie actuelle (notamment Honneth) « a intériorisé l’ordre social existant comme horizon ultime du pensable [23] » : la critique est devenue alors une thérapeutique du social qui se limite à réparer un monde que l’on ne considère plus comme susceptible d’être transformé. Ainsi Kouvélakis s’interroge-il sur les conditions d’une reprise contemporaine du projet théorique des années trente en mettant en avant son analyse du potentiel régressif inhérent à la modernité capitaliste. Alain Patrick Olivier travaille sur l’actualité de la dialectique comme modalité de la théorie critique sur le plan tant métaphysique que politique chez Adorno et sur les possibilités effectives de l’émancipation (ainsi que sur ses obstacles) dans un monde marqué par l’expérience fasciste ou post-fasciste, en particulier à travers l’éducation et la philosophie. Il se situe dans le sillage de Honneth sur les questions d’éducation et de reconnaissance et développe actuellement une réflexion sur la philosophie avec les enfants [24].

7 Les ressources théoriques de l’École de Francfort semblent alors ne pas se tarir. Ce n’est pas un hasard si, récemment, John Abromeit a porté son attention sur les études de la personnalité autoritaire menées par les chercheurs de l’Institut dans les années quarante. Dans la préface au livre The Authoritarian Personality, Horkheimer soulignait la nouveauté de ces recherches montrant que le type autoritaire de l’homme constitue un « nouveau type anthropologique [25] ». Selon Abromeit, La personnalité autoritaire s’inscrit dans la continuité de la première Théorie critique développée dans les années trente, toujours essentielle pour comprendre la résurgence effrayante de l’autoritarisme aux États-Unis au cours de ces dernières années [26].

8 Sans prétendre épuiser les enjeux actuels de la Théorie critique, ni les tenants et les aboutissants du débat qu’elle engendre ni les modalités de la mise en œuvre de l’approche critique [27], il est loisible de soutenir que certaines de ses réactualisations se confrontent à l’héritage des années trente voire des années vingt, l’assumant et le réinscrivant dans de nouveaux contextes [28]. À l’occasion du centenaire de la création de l’Institut für Sozialforschung (1923) [29] et du cinquantenaire de la mort de Horkheimer (1973), les défis, les contradictions et les pathologies de notre temps poussent certains penseurs (philosophes, sociologues, économistes, etc.) à revenir sur le projet de la Théorie critique des années trente et quarante pour renouveler son analyse du potentiel régressif de la modernité, établir le rôle de la critique face à la vitalité du capitalisme contemporain, s’interroger sur le rapport entre théorie critique et passé colonial, et mettre la pensée critique à l’épreuve des études de genre et des perspectives féministes. Ce n’est pas un hasard, si, en se réclamant de la première École de Francfort, des auteurs contemporains – comme Katia Genel [30] et Luca Scafoglio – soulignent la spécificité de la méthode critique et mettent à jour sa fonction de diagnostic des pathologies sociales. Ainsi poursuivent-ils le travail de la première génération des théoriciens francfortois visant à effectuer, au travers de l’articulation entre cadre théorique et recherche empirique [31], un diagnostic du temps présent dans l’optique de « repenser les rapports entre le singulier et le Tout social contre toute légitimation de l’ordre existant [32] ».

9 Ce dossier se propose d’enrichir la discussion sur la Théorie critique aujourd’hui à la lumière des enjeux et des revendications que nous venons d’exposer. Il se compose de cinq articles qui utilisent les outils forgés par les théoriciens francfortois dans l’optique de diagnostiquer et décrire certains troubles, ambivalences et contradictions de nos sociétés. Se réclamant de Benjamin et Adorno, Estelle Ferrarese démontre que la consommation éthique collabore à l’ordre même auquel elle voudrait s’opposer et que le marché désarme perpétuellement les normes morales qu’on prétend y injecter. Katia Genel passe en revue les différentes démarches par lesquelles les théoriciens critiques (de Horkheimer et Adorno jusqu’à Habermas et Honneth) examinent et expliquent les pathologies du social en mettant en lumière la spécificité de chaque approche. À partir des réflexions de Horkheimer sur la critique de l’économie politique dans les années trente, Marcos Nobre thématise la dispute sur la « meilleure théorie » dans le domaine de la Théorie critique en montrant que cette controverse finit par éclipser la tâche première de la pensée critique, qui consiste à produire les diagnostics les plus complexes et les plus précis possibles de sa propre époque, jusqu’à brouiller la différence entre théorie critique et théorie traditionnelle. Se réclamant de la perspective de l’émancipation définie par Adorno, Alain Patrick Olivier montre que la Théorie critique met en lumière la présence du tabou sexuel dans l’éducation et que, par ce biais, elle nous permet non seulement de penser les conditions de la non-éducation, mais aussi de proposer une forme de critique nécessaire de ce genre de tabou. Luca Scafoglio propose enfin d’ouvrir un dialogue entre la Théorie critique et l’approche décoloniale pour repenser la question de la répression de la nature interne et la dialectique eurocentrée de l’Aufklärung en mettant notamment au jour la continuité et la coexistence entre conquête et expansion coloniale. Un entretien entre Raffaele Carbone, Sonja Lavaert et Pierre-François Moreau clôt ce dossier : il porte sur la manière dont les penseurs francfortois de la première génération réinterrogent les philosophies de l’époque moderne.

Notes

  • [1]
    La Théorie critique n’est pas une réalité unitaire. Helmut Dubiel a divisé l’itinéraire du projet francfortois en trois phases : le matérialisme (1930-1937), la théorie critique (1937-1940) et la critique de la raison instrumentale (1940-1943) ; il a notamment souligné que l’introduction de la notion de « théorie critique » a ouvert une nouvelle phase de la recherche de l’Institut, liée à l’expérience historique des années 1936-1937 (les procès de Moscou, la consolidation du fascisme en Europe) et caractérisée par une nouvelle accentuation philosophique (H. Dubiel, Wissenschaftsorganisation und politische Erfahrung : Studien zur frühen Kritischen Theorie, Francfort-sur-le-Main, Suhrkamp, 1978, p. 56-87).
  • [2]
    R. Fine, « On the Critique of Rights : Adorno, Critical Theory and Natural Law », dans Critical Theory and the Challenge of Praxis : Beyond Reification, dir. S. Giacchetti Ludovisi, Aldershot, Ashgate, 2015, p. 145-158, ici p. 145.
  • [3]
    C’était aussi le cas de Walter Benjamin dès les années trente. Sur la théorie du fascisme chez les théoriciens francfortois voir J. Christ, « Un autre dépérissement de l’État… L’École de Francfort à ses débuts et la philosophie politique classique », dans Tumultes, n° 44, 2015/1, p. 53-69.
  • [4]
    M. Horkheimer, « L’État autoritaire », dans Id., Théorie critique. Essais, trad. Groupe du Collège de philosophie, Paris, Payot, 2009 [1978], p. 301-325.
  • [5]
    M. Jay, Marxism and Totality : the Adventures of a Concept from Lukács to Habermas, Berkeley-Los Angeles, University of California Press, 1984, p. 200.
  • [6]
    Voir B. Frère, « Introduction : la relance de la critique », dans Le Tournant de la théorie critique, dir. B. Frère, Paris, Desclée de Brouwer, 2015, p. 7-34.
  • [7]
    Comme l’a montré Alain Patrick Olivier, d’une part, les « Lumières » constituent un projet qui est à même de donner sens à nos conceptions philosophiques, politiques et pédagogiques en crise (c’est l’actualité de la mise en œuvre d’un effort d’éclaircissement et de pensée critique, dont les potentialités n’appartiennent pas à une époque donnée) ; d’autre part, elles sont sujettes à caution car, aux yeux de leurs détracteurs, elles sont censées faire renaître des formes de domination, d’oppression et d’obscurantismes sous un nouveau jour. Voir A. P. Olivier, « Le concept d’Aufklärung dans la philosophie d’Adorno », dans L’Éducation et les Lumières. Enjeux philosophiques et didactiques contemporains, dir. M. Fabre et C. Chauvigné, Paris, Raison et Passions, 2020, p. 36-50.
  • [8]
    J. Habermas, Le Discours philosophique de la modernité. Douze conférences, Paris, Gallimard, 1988, p. 143 et seq.
  • [9]
    Y. Cusset, Habermas. L’espoir et la discussion, Paris, Michalon, 2001, p. 11. Stefano Petrucciani a récemment interrogé la pertinence de cette critique dans son article « Adorno, Horkheimer e la critica della ragione moderna », dans Modernità e critica, dir. R. Carbone, 2 vol., Naples, La Città del sole, 2022, t. II, p. 419-433.
  • [10]
    « Horkheimer : Notre sujet : sauver l’Aufklärung, ce qui signifie déterminer la relation positive entre l’absolu et la pensée » (M. Horkheimer et Th. W. Adorno, [Sauver l’Aufklärung. Discussions sur un projet d’ouvrage au sujet de la dialectique, 1946], dans Le Laboratoire de la dialectique de la raison. Discussions, notes et fragments inédits, traduits par J. Christ et K. Genel, Montréal, Les Presses de l’Université de Montréal / Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2014, p. 263-276, ici p. 264). Voir aussi Id., La dialectique de la raison. Fragments philosophiques, traduit de l’allemand par É. Kaufholz, Paris, Gallimard, 2013 [1974], p. 20.
  • [11]
    E. Renault et Y. Sintomer, « Introduction », dans Où en est la théorie critique ?, dir. E. Renault et Y. Sintomer, Paris, La Découverte, 2003, p. 7-30, ici p. 18-19.
  • [12]
    R. Jaeggi, « A Wide Concept of Economy : Economy as a Social Practice and the Critique of Capitalism », dans Critical Theory in Critical Times, dir. P. Deutscher et C. Lafont, New York, Columbia University Press, p. 160-180.
  • [13]
    R. Jaeggi, Kritik von Lebensformen, Berlin, Suhrkamp, 2014, p. 20-21.
  • [14]
    Voir R. Jaeggi, « Une critique des formes de vie est-elle possible ? Le négativisme éthique d’Adorno dans Minima Moralia », traduit de l’allemand par A. Berlan, dans Actuel Marx, n° 38, 2005/2, p. 135-158.
  • [15]
    Th. W. Adorno, « Radiorede über Max Horkheimer », in Id., Gesammelte Schriften, édités par R. Tiedemann, avec la collaboration de G. Adorno, S. Buck-Morss et K. Schultz, t. 20.1 : Vermischte Schriften I : Theorien und Theoretiker/ Gesellschaft, Unterricht, Politik, 2 vol., Francfort-sur-le-Main, Suhrkamp, 1997, t. I, p. 154 ; cité par R. Jaeggi, « Une critique des formes de vie est-elle possible ? », art. cité, p. 146-147, p. 155.
  • [16]
    R. Jaeggi, « Une critique des formes de vie est-elle possible ? », art. cité, p. 155.
  • [17]
    A. Allen, The End of Progress. Decolonizing the Normative Foundations of Critical Theory, New York, Columbia University Press, 2015, p. 19.
  • [18]
    R. Zambrana, « Normative Ambivalence and the Future of Critical Theory : Adorno and Horkheimer, Castro-Gómez, Quijano on Rationality, Modernity and Totality », dans Critical Theory and the Challenge of Praxis, ouvr. cité, p. 101-116, ici p. 106-107.
  • [19]
    Ibid., p. 107, 113.
  • [20]
    A. Quijano, « Coloniality and Modernity/Rationality », dans Cultural Studies, vol. 21, n° 2, 2007, p. 168-178, ici p. 172.
  • [21]
    E. Ferrarese, La Fragilité du souci des autres.Adorno et le care, Lyon, ENS Éditions, 2018, p. 97.
  • [22]
    M. Nobre, « How Practical Can Critical Theory Be ? », dans Critical Theory and the Challenge of Praxis, ouvr. cité, p. 159-172.
  • [23]
    S. Kouvélakis, La Critique défaite. Émergence et domestication de la théorie critique, Paris, Éditions Amsterdam, 2019, p. 518.
  • [24]
    On se reportera à A. P. Olivier, « Philosophie avec les enfants et pensée critique. Sur la perspective d’Axel Honneth », dans La Philosophie avec les enfants. Un paradigme pour l’émancipation, la reconnaissance et la résonance, dir. E. Chirouter, Paris, Éditions Raison publique, 2022, p. 59-70. Voir aussi, dans cet ouvrage collectif, l’« Introduction » par E. Chirouter et A. P. Olivier (p. 15-16), « Le philosophe et l’enfant en lutte pour la reconnaissance », Entretien avec A. Honneth, par D. Berner-Zumpf, traduit de l’allemand par A. P. Olivier (p. 47-57) et l’article de H. Rosa, « La philosophie est une forme enfantine de relation au monde » (p. 185-198).
  • [25]
    M. Horkheimer, « Preface », Th. W. Adorno, E. Frenkel-Brunswik, D. J. Levinson, R. N. Sanford, The Authoritarian Personality, New York, Harper & Brothers, 1950, p. ix-xii, ici p. ix.
  • [26]
    J. Abromeit, « The Concept of Pseudo-Conservatism as a Link Between The Authoritarian Personality and Early Critical Theory », dans Polity, vol. 54, n° 1, 2022, p. 29-58.
  • [27]
    On peut par exemple évoquer l’œuvre de Hartmut Rosa ou de Stéphane Lessenich qui essayent d’analyser et de critiquer le capitalisme contemporain en tant que formation sociale en s’appropriant certains concepts utilisés dans le domaine de l’économie (comme celui d’externalisation). Ils attirent l’attention tout particulièrement sur les menaces écologiques, comme le changement climatique, lesquelles sont soit ignorées soit acceptées avec fatalisme en raison du chômage et de la stagnation économique. Voir par exemple Soziologie - Kapitalismus - Kritik. Eine Debatte, dir. K. Dörre, S. Lessenich, H. Rosa, avec la collaboration de Th. Barth, Francfort-sur-le-Main, Suhrkamp, 2009, notamment l’« Introduction », p. 9-17, où, prenant le contrepied d’une sociologie assujettie au modèle néolibéral dominant, les auteurs font valoir l’exigence d’une sociologie capable, en tant que science de la société, de développer une analyse critique des relations sociales de son propre temps. Voir aussi S. Lessenich, À côté de nous le déluge. La société d’externalisation et son prix, Préface de A. Theurillat-Cloutier, traduit de l’allemand par R. Roy (avec la collaboration de S. Lanctôt), Montréal, écosociété, 2019 ; Id., « Petite Auberge Aufbruch Zu den Möglichkeitsräumen kritischer Sozialforschung heute », dans Soziologie, Vol. 51, n° 2, 2022, p. 115-126.
  • [28]
    G. Raulet, « L’aporie de la théorie critique. Les stratégies de renouvellement du noyau théorique », dans Où en est la Théorie critique ?, ouvr. cité, p. 33-58, ici p. 34.
  • [29]
    Rappelons qu’à l’occasion de son centième anniversaire, l’Institut de recherche sociale a organisé la conférence internationale Futuring Critical Theory (Université Goethe de Francfort-sur-le-Main, 13-15 septembre 2023). Dans le même esprit, le 20 octobre 2023, Stephan Lessenich a donné une conférence au CIPh, intitulé « Une petite auberge nommée nouveau départ ».
  • [30]
    Considérons par exemple l’effort de restituer le modèle complexe de critique radicale développé dans la dialectique de la raison dans la mesure où il peut donner des clés pour élaborer une théorie des sociétés capitalistes contemporaines et de leurs dysfonctionnements. C’est en interrogeant la pertinence de ce modèle qu’il est possible de détecter les voies par lesquelles la critique peut être poursuivie dans le présent. Voir K. Genel, « Introduction. Que faire de la radicalité de La dialectique de la raison ? », dans La Dialectique de la raison. Sous bénéfice d’inventaire, dir. K. Genel, Paris, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2017, p. 9-22.
  • [31]
    Cette interaction est complexe. D’une part, en effet, la pensée philosophique (Horkheimer, Marcuse, Adorno) s’oriente vers la dimension empirique, d’autre part, les savoirs disciplinaires (Pollock, Fromm, Gurland, Grossmann, Neumann, Löwenthal) sont imprégnés d’implications théoriques et de réflexions méthodologiques (L. Scafoglio, Il disagio dell’astrazione. Una lettura a partire da Adorno, Naples, La Città del sole, 2021, p. 18).
  • [32]
    Voir K. Genel, Autorité et émancipation : Horkheimer et la Théorie critique, Paris, Payot, 2013, p. 51.