FATHI TRIKI, VICENTE SERRANO MARIN, RICARDO PARELLADA, TXETXU AUSIN, Formes de rationalité et dialogue interculturel (Olms, Hildesheim, 2006)
1 À un moment historique comme l’est celui que nous vivons, enchevêtré dans une dialectique entre choc et alliance de civilisations, ce livre offre une réflexion sur la possibilité même du dialogue interculturel entre le monde arabe et le monde occidental. Les textes qui y sont proposés mettent en évidence non seulement le vaste héritage commun, mais aussi la réflexion qui en découle et qui permet d’approfondir cette compréhension. La philosophie et l’éthique éclairent toujours la scène complexe des relations humaines au centre de laquelle apparaissent de nouveau le concept de rationalité et les manières de l’exercer. Ceci n’est possible qu’à partir de la recherche d’une modernité juste et alternative, capable de civiliserce qu’on appelle le choc des civilisations.
2 Cette alter modernité se fera par la transculturalité qui fait sien l’aspect critique de toute culture pour en déterminer à la fois d’une façon transversale et transcendante ce qui peut être universel et constituer par là un corpus critique et toujours renouvelable de valeurs communes à toute l’humanité.
3 Pour cela, une émancipation du « tout culturel » mais aussi du divers éparpillé du culturel est nécessaire tout en gardant opératoires les différences culturelles. Les cultures ne dialoguent pas et il est inutile de trouver un ordre dialogique entre les différentes cultures. Il y a plutôt « une rencontre » (Derrida, « Violence et métaphysique » in L’écriture et la différence, Seuil, Paris, 1967, p. 134) des cultures, rencontre qui peut se faire dans l’ordre de l’hospitalité, de l’étrangeté et de l’extériorité, mais aussi, dans l’ordre de l’hostilité et du désir de « consommation » et de destruction. Évidemment, le non-savoir peut être à l’origine du mal et des conflits. C’est pourquoi tous les auteurs de ce livre sont d’accord pour insister sur la connaissance des autres cultures, qui peut dans une grande mesure transformer toute rencontre originellement violente en une hospitalité réfléchie.
4 L’intercompréhension qui peut s’exprimer par plusieurs modalités conceptuelles comme l’agir communicationnel, la raisonnabilité ou même l’interculturalité dans sa logique dialogique contribue à circonscrire la violence dans les rapports inter-humains et interculturels. La transculturalité fait donc appel à la raison comme ouverture et à la sensibilité comme accès direct et non médiatisé à l’humain.

